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Quand tous les océans étaient gelés

 

Quand tous les océans étaient gelés
Joseph L. Kirschvink dans mensuel 355
daté juillet-août 2002 -


A la veille de l'ère Primaire, Il y a quelque 600 millions d'années, la Terre aurait été entièrement gelée au moins à cinq reprises. Chaque fois, les glaces auraient fondu à la faveur d'un réchauffement par effet de serre. Emise voici dix ans, l'hypothèse reste controversée. Mais les indices se multiplient...
La science devient amusante lorsqu'elle permet de simplifier les choses. Le summum étant d'imaginer une théorie qui rende compte d'une multitude d'observations sans dépendance mutuelle apparente. Ce fut le cas de la théorie de la tectonique des plaques qui, dans les années 1960, permit de réunir des observations paléontologiques, pétrographiques, géophysiques, etc., en un seul et même concept unificateur. De telles avancées conceptuelles sont rares. Mais de nombreux aspects obscurs de l'histoire de la Terre laissent encore le champ libre à de nouvelles hypothèses. Ainsi, en 1992, j'ai émis l'idée d'une « Terre boule de neige », c'est-à-dire d'une Terre entièrement gelée, pour résoudre l'énigme des dépôts glaciaires de la fin du Précambrien*, la période qui précède la fameuse « explosion cambrienne » pendant laquelle la plupart des lignées animales sont apparues1. Dix ans après, cette idée provocatrice est toujours l'objet de violents débats.

L'existence de glaciations précambriennes est restée longtemps ignorée. L'Australien Sir Douglas Mawson, de l'université d'Adélaïde, et le Britannique Brian Harland, de l'université de Cambridge, furent les premiers, au milieu du XXe siècle, à reconnaître leur ampleur exceptionnelle. Indépendamment l'un de l'autre, ces deux éminents géologues avaient repéré dans de nombreux ensembles sédimentaires de l'époque les traces d'anciens glaciers : stries parallèles gravées sur les roches par l'écoulement des glaces, cailloux abandonnés par des icebergs, etc. Plus étrange, D. Mawson et B. Harland avaient trouvé, mélangés aux débris glaciaires, des fragments de roches composées de carbonates de calcium calcaires ou de magnésium dolomites, lesquelles se forment dans les eaux chaudes tropicales. Les glaciers précambriens s'étaient apparemment écoulés sur des plateaux carbonatés comme ceux qui entourent les Bahamas aujourd'hui. Le refroidissement était donc survenu immédiatement après un épisode chaud. Autre observation déroutante : ces dépôts glaciaires se retrouvaient en de nombreux points de la planète, y compris sous les tropiques2 ! Les deux hommes en déduisirent que la glaciation qui les avait engendrés, si elle était unique, avait sans doute été d'une ampleur exceptionnelle, jamais égalée dans l'histoire de la Terre3.

Les américians Cornelis Klein et Nic Beukes s'aperçurent quelques années plus tard que les glaciations précambriennes coïncidaient aussi avec la réapparition de dépôts d'argiles très riches en fer les BIF, pour Banded Iron Formations qui avaient disparu depuis plus d'un milliard d'années fig. 1. Or, leur formation suppose un océan privé d'oxygène. Depuis lors, les observations se sont affinées, et nous pensons aujourd'hui que trois ou quatre événements « Boule de neige » se sont succédé au Néo-protérozoïque*, entre 730 et 590 millions d'années2 et qu'un autre au moins a sévi au Paléoprotérozoïque*, il y a 2,2 ou 2,3 milliards d'années4,5.

Valse des continents. Si l'idée de glaciations précambriennes est généralement acceptée par les géologues, l'hypothèse d'événements synchrones, discrets, au cours desquels les glaces seraient descendues jusque sous les Tropiques, est toujours âprement discutée. Les datations restent peu nombreuses. Il est donc difficile d'être certain que les dépôts glaciaires témoignent bien des mêmes événements géologiques. En outre, au Quaternaire, les calottes glaciaires ne sont jamais allées en deçà de 40° de latitude à peu près au niveau de Chicago et de New York. Au nom du précepte géologique qui veut que « le présent est la clé du passé », les scientifiques ont cherché des solutions moins radicales à ce paradoxe climatique.

Dans les années 1960, la nouvelle théorie de la tectonique des plaques leur offrit une explication évidente : carbonates et dépôts glaciaires résultaient tout simplement du mouvement passé des continents. Les premiers s'étaient formés alors que les masses continentales étaient à l'équateur, et les seconds lorsqu'elles s'étaient rapprochées des pôles. Faute de datations, le scénario ne semblait pas impossible. Il permettait en tout cas d'éviter les glaciers tropicaux. Encore fallait-il trouver les preuves de ces déplacements anciens. L'étude du champ magnétique passé ou « paléomagnétisme », bien que balbutiante, était à ce titre riche de promesses. Les géophysiciens s'étaient aperçus que certains minéraux comme la magnétite ou l'hématite acquièrent, au moment de leur formation, une aimantation dont la direction et le sens sont ceux du champ magnétique ambiant. Or, celui-ci varie avec la latitude : il est pratiquement horizontal à l'équateur et vertical aux pôles. En mesurant le champ magnétique des roches anciennes, il était possible de retrouver la latitude à laquelle elles s'étaient formées. Et donc de reconstituer le cheminement des continents.

Les premiers résultats que Brian Harland obtint en 1961 étaient en faveur d'une glaciation tropicale : les échantillons prélevés au Groenland et au Spitzberg exhibaient en effet un champ magnétique presque horizontal, typique des basses latitudes. Le Belge Lucien Cahen obtint des résultats similaires peu de temps après. Mais cette conclusion déclencha une vive polémique. Pouvait-on se fier à une technique qui, à plusieurs reprises, avait été mise en défaut ? Maintes fois, il était apparu que le magnétisme mesuré n'était pas d'origine et qu'il avait été acquis postérieurement alors que la roche avait été chauffée. Et sans mesures paléomagnétiques sur les dépôts glaciaires eux-mêmes, impossible d'exclure l'existence de dérives continentales rapides entre l'équateur et les pôles.

Moins de soleil. D'autres scénarios furent proposés dans lesquels les glaciers pouvaient atteindre l'équateur sans pour autant que la Terre soit complètement gelée. Par exemple, George Williams, de l'université d'Adélaïde, défendit l'idée selon laquelle l'obliquité* de la Terre était plus forte au Précambrien qu'elle ne l'est aujourd'hui. En conséquence, les régions équatoriales recevaient moins d'ensoleillement que les pôles. Que cela ait pu engendrer des glaciers aux basses latitudes fut très chaudement discuté2.

L'hypothèse d'une glaciation tropicale n'était pas non plus admise par les modélisateurs du climat. A la fin des années 1960, en pleine guerre froide, planait la menace d'un holocauste nucléaire et, avec elle, celle d'un bouleversement du climat planétaire. Des modèles numériques furent donc développés aux Etats-Unis et en Union soviétique afin d'en prévoir les effets. C'est dans ce contexte que le Russe Mikhaïl Budyko développa un modèle de bilan radiatif*. Ses résultats étaient surprenants : la Terre gelait entièrement dès que les calottes glaciaires atteignaient 30° de latitude6. La raison en est purement physique. La glace, blanche et brillante, réfléchit fortement le rayonnement solaire. De ce fait, la quantité d'énergie solaire absorbée par la surface terrestre diminue, le refroidissement initial s'intensifie et la couverture de glace s'épaissit. Avec ce mécanisme, appelé « rétroaction de l'albédo des glaces », la Terre ne cesse de se refroidir et la glace d'avancer dans un cycle sans fin. D'après les calculs de Budyko, les températures pouvaient ainsi descendre jusqu'à environ - 50 °C et la glace s'accumuler sur 1,5 km d'épaisseur à l'équateur et sur 3 km aux pôles ! Cependant, le Globe gelé de Budyco ne revenait jamais à la normale. Comme aucun mécanisme connu ne pouvait le sortir de cette catastrophe glaciaire et que la Terre n'est plus gelée, les paléoclimatologues en déduisirent qu'un tel scénario ne s'était jamais déroulé : il fut considéré comme une solution imaginaire pour les modèles climatiques...

Magnétisme originel. Il fallut attendre près de vingt ans pour que l'hypothèse de glaciations tropicales revienne sur le devant de la scène. En 1986, les Australiens George Williams et Brian Embleton publièrent la première étude paléomagnétique vraiment convaincante : ils montrèrent que l'aimantation des fines couches glaciaires d'Elatina, au sud de l'Australie, était fossilisée dans des grains d'origine sédimentaire et qu'elle n'avait jamais été perturbée par des processus thermiques7. Or, cette aimantation était... « équatoriale ». Ils étaient à deux doigts de prouver définitivement la présence de glaciers aux basses latitudes. Mais il manquait encore un élément essentiel : le moment exact où ce magnétisme avait été acquis.

Regroupement équatorial. C'est à cette époque que je suis entré en scène. En 1987, Bruce Runnegar, de l'université de Californie, à Los Angeles, était allé en Australie, sur le site d'Elatina, et avait collecté pour mon étudiant et moi-même un bel échantillon. Les lits de sédiments y étaient bien visibles, de même que les plissements qui les affectaient fig. 2. Nous avons montré que le magnétisme avait été acquis avant que les sédiments ne soient plissés, lorsqu'ils étaient encore mous, vraisemblablement au moment de leur dépôt. La preuve tant recherchée était là, sous nos yeux. Cette petite étude, qui fit l'objet d'un résumé dans les actes d'un colloque8, stimula les Australiens qui se lancèrent dans l'analyse complète du paléomagnétisme d'Elatina9. Nos premiers résultats furent confirmés. Mais la polémique se poursuivit. De nombreux géologues refusaient toujours l'idée de glaciers tropicaux. Cependant, Elatina n'était pas unique en son genre, et d'autres enregistrements allaient bientôt révéler des faits semblables10.

Mais revenons en 1987. Je faisais alors partie du groupe de recherche sur la paléobiologie du Précambrien PPRG que J.William Schopf et Bruce Runnegar venaient de créer à l'université de Californie, à Los Angeles. J'étais chargé de rassembler les données disponibles en paléontologie, géologie et géomagnétisme, afin de reconstituer le déplacement des continents à la fin du Précambrien. Ce faisant, je m'aperçus que de larges zones continentales se trouvaient à l'équateur lors des glaciations11 fig. 3. Finalement, le scénario prédit et rejeté par Mikhaïl Budyco était-il possible ? J'imaginais alors la Terre, complètement gelée, ressemblant à une énorme boule de neige. N'y avait-il vraiment aucun moyen de sortir d'une telle catastrophe glaciaire ? Les modèles sont censés expliquer les observations, pas les exclure ! Il me vint à l'esprit qu'une glaciation, même globale, n'avait pu empêcher les volcans de fonctionner et de rejeter du gaz carbonique. En temps normal, ces émissions sont compensées à la fois par la photosynthèse* et par l'érosion des roches silicatées* qui jouent le rôle de pompe à carbone. Mais dans le cas d'une Terre entièrement gelée, le cycle hydrologique aurait été interrompu, et le gaz carbonique se serait accumulé dans l'atmosphère. Résultat, la surface de la Terre se serait réchauffée par effet de serre, la glace aurait fondu, mettant fin à la glaciation.

L'hypothèse était séduisante. En outre, elle expliquait les dépôts riches en fer, les fameux BIF dont nous avons déjà parlé. Le carcan de glace bloquait les échanges entre l'océan et l'atmosphère. Mais en profondeur les cheminées hydrothermales continuaient à fonctionner : l'eau de mer circulait à l'intérieur de la croûte océanique, se réchauffant au contact du magma avant de remonter sous forme d'eau chaude chargée d'éléments métalliques dont le fer lessivés des roches traversées. Lorsque la glace a fondu, les échanges avec l'atmosphère ont repris et l'eau s'est réoxygénée. Le fer a réagi avec l'oxygène il est insoluble en présence d'oxygène et a précipité massivement sur le fond de l'océan fig. 1. Les dépôts riches en fer plus anciens ont dû se former lorsque les océans et l'atmosphère renfermaient peu d'oxygène.

Mon émotion était à son comble. Petit à petit, les pièces du puzzle s'agençaient : le magnétisme fossile, l'étrange composition des blocs de roches détritiques retrouvés dans les dépôts glaciaires et les BIF pouvaient s'expliquer par un seul et même concept que je baptisais « Snowball Earth » ou « Terre boule de neige1 », pour le distinguer de celui de « Terre blanche » des modélisateurs et pour souligner qu'il s'agissait d'une hypothèse testable.

Mais, en cette fin des années 1980, le scénario était encore incomplet. En particulier, j'ignorais quelles teneurs en gaz carbonique permettaient de sortir de l'événement boule de neige. En 1992, Jim Kasting, de l'université de Pennsylvanie, qui faisait également partie du PPRG, calcula qu'il fallait une pression partielle en CO2 de 0,12 bar soit environ 400 fois plus qu'actuellement. Cette valeur était compatible avec une accumulation du gaz dans l'atmosphère pendant plusieurs millions d'années par dégazage volcanique. A l'époque, nous ne nous étions pas vraiment inquiétés des conséquences possibles de telles concentrations. On sait aujourd'hui que cet excès de gaz carbonique fut immédiatement éliminé et précipité sous forme de carbonates. Dès la fin des années 1980, les géologues avaient constaté que d'épaisses séquences de carbonates coiffaient les dépôts glaciaires néoprotérozoïques. En 1998, Paul Hoffman et Daniel Schrag, de Harvard, montrèrent que les carbonates de Namibie s'étaient probablement déposés, alors que la température globale était de 50 °C. Et qu'ils avaient les mêmes rapports isotopiques que le carbone émis par les volcans12.

Le manganèse issu du dégel. Quoi qu'il en soit, les travaux de Hoffman et de ses collègues suscitèrent encore plus notre intérêt. Il fallait regarder de plus près le premier événement Boule de neige, celui du Paléoprotérozoïque. Des calculs similaires démontrèrent qu'il avait fallu une pression de CO2 d'environ 0,6 bar près de 2 000 fois le niveau actuel pour sortir de cet événement qui avait duré environ 70 millions d'années ! Nous nous sommes donc rendus en Afrique du Sud pour y chercher d'éventuels indices d'un dégel rapide4,5. Là, juste au-dessus des dépôts glaciaires et des BIF, nous avons découvert une couche d'oxydes de manganèse épais d'une cinquantaine de mètres. Connue sous le nom de « Kalahari Manganese Field », elle représente 80 % des réserves mondiales de ce métal ! Nous avons réalisé à ce moment-là que tous les autres dépôts de manganèse d'origine sédimentaire connus étaient également associés aux BIF néoprotérozoïques et donc à la présence de glace sous les Tropiques. Le cation métallique Mn2+ est commun dans les fluides hydrothermaux mais son dépôt requiert quantité d'oxygène moléculaire. Or, celui-ci est essentiellement produit par la photosynthèse.

Les dépôts de Kalahari attestent donc son existence dès cette époque. Ils sont même la plus ancienne preuve directe de l'existence d'oxygène moléculaire de l'histoire de la Terre. Avant l'apparition de la photosynthèse, l'atmosphère était fortement réductrice. Gaz sulfurés comme H2S et SO2 et méthane dont l'effet de serre est l'un des plus forts y flottaient librement.

Zones refuges. On ne sait toujours pas très bien ce qui a déclenché les glaciations du Néoprotérozoïque. En revanche, c'est probablement l'augmentation de la concentration de l'oxygène dans l'air qui a été à l'origine de la première glaciation globale. L'évolution progressive de la composition de l'atmosphère aurait en effet détruit l'effet de serre lié au méthane.

Stimulés par cette masse d'observations, les modélisateurs ont cherché à simuler les événements Boule de neige de façon plus réaliste. Voici deux ans, William Hyde, du département d'océanographie de l'université A&M du Texas, a couplé un bilan radiatif à un modèle d'évolution des calottes de glaceI. De façon surprenante, il a obtenu une solution quasi stable dans laquelle les glaces atteignent l'équateur tout en épargnant de larges zones équatoriales on parle de « boule de neige fondue »13. Une solution qui plaît beaucoup aux géobiologistes car ces zones auraient pu servir de refuge aux premières lignées animales. N'oublions pas que celles-ci seraient apparues, d'après les biologistes moléculaires, plusieurs centaines de millions d'années avant les glaciations quelques dizaines de millions d'années seulement pour les paléontologues14. Reste que les fortes concentrations en CO2 nécessaires pour sortir d'un épisode Boule de neige auraient sans nul doute été fatales aux animaux utilisant les protéines de la famille des globines l'hémoglobine, la myoglobine, etc. pour le transport de l'oxygène. En outre, le modèle de Hyde ne rend pas compte de la plupart des observations voir tableau.

Je soupçonne pour ma part un scénario plus complexe dans lequel une glaciation initiale du genre de celles qui se sont déroulées plus tard, au Phanérozoïque*, aurait progressivement basculé vers un événement de type Boule de neige assez long. Celui-ci se serait terminé par un épisode glaciaire particulièrement intense. Cela suppose bien sûr que certains organismes aient pu survivre à ces conditions extrêmes. Mais il semble tout à fait possible que des protozoaires aient pu se réfugier dans les profondeurs océaniques, à proximité des sources hydrothermales. Et c'est l'amélioration du climat après la dernière glaciation, vers 590 millions d'années, qui aurait favorisé l'émergence des premières lignées animales. La balle est désormais dans le camp des biologistes et des paléontologues.
1 J.L.Kirschvink, Late Proterozoic Low-Latitude Global Glaciation : the Snowball Earth ; in the Proterozoic Biosphere : a Multidisciplinary Study. Schopf J.W. et al. eds, Cambridge University Press, 1992, p. 51-52.

2 P.F. Hoffman et D.P. Schrag, Terra Nova 2002, sous presse.

3 M.J. Hambrey et W.B. Harland,

Earth's Pre-Pleistocene Glacial Record, Cambridge, United Kingdom GBR, Cambridge Univ. Press, 1981.

4 D.A. Evans et al., Nature, 386, 262, 1997.

5 J.L. Kirschvink et al., P.N.A.S., 97, 1400, 2000.

6 M.I. Budyko, Tellus, 21, 611, 1969.

7 B.J.J. Embleton et G.E. Williams, Earth and Planetary Science Letters, 79, 419, 1986.

8 D.Y. Sumner et al., EOS, Trans. American Geophysical Union, 68, 1251, 1987.

9 P.W. Schmidt et al., Earth and Planetary Science Letters, 105, 355, 1991.

10 D.A.D. Evans, American Journal of Science, 300, 347, 2000.

11 J.L. Kirschvink, A Paleogeographic Model for Vendian and Cambrian Time ; in the Proterozoic Biosphere : a Multidisciplinary Study. Schopf J.W. et al. eds, Cambridge University Press, p. 567-581, 1992.

12 P.F. Hoffman et al., Science, 281, 1342, 1998.

13 W.T. Hyde et al., Nature, 405, 425, 2000.

14 B. Runnegar, Nature, 405, 403, 2000.
NOTES
* Le Précambrien s'étend de la formation de la Terre, il y a 4,55 milliards d'années à environ 543 millions d'années.

*Le Protérozoïque est le dernier étage du Précambrien. Il couvre la période de l'histoire de la Terre qui va de 2,5 milliards d'années à environ 543 millions d'années. Il se subdivise à son tour en Paléo-protérozoïque 2,5 à 1,6 milliard d'années, Mésoprotérozoïque 1,6 milliard à 900 millions d'années et Néo-protérozoïque 900 à 543 millions d'années.

* L'obliquité est l'angle que fait l'axe de la Terre avec l'écliptique. C'est elle qui module la quantité d'ensoleillement reçue aux différentes latitudes suivant les saisons.

* Le bilan radiatif est la différence entre le rayonnement reçu et celui réémis par la Terre.

*La photosynthèse est l'ensemble des réactions par lesquelles les plantes fabriquent les sucres nécessaires à leur croissance à partir du gaz carbonique et

de l'eau grâce à l'énergie lumineuse absorbée par la chlorophylle.

*Lorsque les roches silicatées se dégradent, le CO2 est converti en ions carbonates qui, entraînés vers les océans, vont se combiner à des ions calcium et magnésium pour former des sédiments carbonatés. Le carbone est alors stocké dans les carbonates.

*Le Phanérozoïque s'étend de 543 millions d'années à nos jours.
LA BALEINE, COUSINE DU MOUTON
Epilogue de cinquante ans de controverses sur la famille originelle des ancêtres terrestres de nos cétacés aquatiques. Deux squelettes datant du début du tertiaire, découverts au cours de l'été 2001 au Pakistan, ont permis de trancher : nos cétacés, tels que la baleine, le dauphin ou le marsouin, descendent bien des artiodactyles, groupe constitué d'ongulés herbivores au nombre impair d'orteils, qui comptent parmi leurs descendants les hippopotames, les vaches et les moutons.

Cette filiation avait la faveur des biologistes moléculaires, mais elle était dénoncée par les paléontologues qui, à partir de correspondances morphologiques sur les dents et les oreilles, postulaient que nos cétacés étaient apparentés au groupe des mésochyniens, ongulés carnivores du début de l'époque tertiaire dont il n'existe plus de descendant.

Les squelettes d'Ichtyolestes et Pakicetus découverts au Pakistan par l'équipe de Johannes Thewinssen, de l'université Northeastern dans l'Ohio, présentent le mérite d'être, pour la première fois, quasiment complets, et d'être pourvus d'un petit os des chevilles, l'astragale. A l'origine d'une grande mobilité du pied, celui-ci apporte la preuve que les ancêtres de nos cétacés étaient d'intrépides coureurs terrestres.

« C'est l'une des découvertes les plus importantes du XXe siècle en paléontologie des vertébrés, estime Christian de Muizon, du Muséum national d'histoire naturelle de Paris. Comme l'Archéoptéryx pour les oiseaux ou l'Australopithèque pour l'homme, Pakicetus constitue un élément clé dans l'évolution des espèces. »

Quant au plus proche parent actuel des cétacés, la question reste posée. Est-ce l'hippopotame, comme le pensent les biologistes moléculaires ? L'étude morphologique faite par l'équipe de J. Thewissen ne permet pas de trancher. E. B.

J.G.M. Thewissen et al., Nature, 413, 277, 2002 / F. Spoor et al., Nature, 417, 163, 2002.
UN BILAN EN FAVEUR D'UNE TERRE GELÉE
J'ai résumé dans ce tableau les observations géologiques mentionnées dans le texte et donné mon avis subjectif ! sur le fait qu'elles sont ou non expliquées par les différentes hypothèses. L'hypothèse d'une modification de l'obliquité de la Terre ne rend compte que des dépôts glaciaires des basses latitudes. La Terre boule de neige fondue n'offre pas d'explication valable pour les BIF Banded Iron Formations, les niveaux de manganèse ou des calottes de carbonates, qui tous supposent un océan privé d'oxygène. En outre ce scénario n'explique pas comment sortir d'une glaciation.
SAVOIR
-La page de Paul Hoffman sur la Terre en boule de neige : www-eps.harvard.edu

-BBC Horizon : www.bbc.co.uk arth.shtml

 

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LE SAHARA

 


 

 

 

 

le Sahara

Le plus grand désert du monde, en Afrique, couvrant plus de 8 millions de km2 (recevant moins de 100 mm d'eau par an), entre l'Afrique du Nord méditerranéenne et l'Afrique subsaharienne, l'océan Atlantique et la mer Rouge.

Le Sahara est un ensemble politiquement fractionné. De part et d'autre du tropique du Cancer, il s'étend sur une dizaine d'États : le Maroc, l'Algérie, la Tunisie, la Libye, l'Égypte, le Soudan, le Tchad, le Niger, le Mali et la Mauritanie. Ce découpage frontalier, aujourd'hui assumé par les États africains, est toutefois source de contestations par les populations locales (fédération touareg), de revendications territoriales (Sahara occidental), de conflits et de mouvements de populations réfugiées. Pour les États du Maghreb ou du Makrech tournés vers la Méditerranée, les territoires sahariens constituent des arrières pays en voie d'intégration. Pour plusieurs États saharo-sahéliens (Mali, Niger, Tchad, Soudan), l'enclavement s'ajoute à l'aridité.

Le Sahara représente le modèle des déserts chauds, caractérisé par des étés longs et torrides, des contrastes thermiques (annuels et journaliers) accentués, une sécheresse extrême de l'air, la grande irrégularité et la rareté des pluies. Pourtant, se frontières connaissent la pluie : en automne, au nord, en été, au sud.
Le Sahara, peu peuplé hormis le couloir du Nil, dispose de ressources, principalement souterraines (phosphates, hydrocarbures, nappes aquifères fossiles). Il est aussi propice à un tourisme d'aventure, contrarié par une insécurité endémique.
Le Sahara est un espace convoité. Les enjeux géopolitiques et économiques des espaces sahariens suscitent de nombreuses convoitises entre de multiples acteurs internes à l'Afrique ou extérieurs : zones d'influence, contrôle de territoires, exploitation de ressources (pétrole, uranium, par exemple). Ces convoitises se manifestent dans les investissements en provenance, le plus souvent, d'autres parties du monde, et s'expriment, entre autres, dans les conflits intra et interétatiques dont les populations subissent les effets, conjugués à ceux de la mal gouvernance.
GÉOGRAPHIE

1. Le milieu naturel

1.1. Le climat


Le Sahara est l'exemple le plus caractéristique du désert zonal, lié à la présence à cette latitude des hautes pressions subtropicales, séparées des basses pressions équatoriales par le F.I.T. (front intertropical). C’est le balancement saisonnier de cette ceinture anticyclonale qui engendre les divers types de temps rencontrés. Les hautes pressions centrées sur le Sahara sont responsables de la sécheresse, qui peut être très intense (l’humidité relative est descendue à 2,3 % à Tamanrasset).
Des pluies très faibles
Cette sécheresse explique l'indigence des précipitations annuelles. Les pluies sont particulièrement irrégulières au centre, et les plus faibles pluviosités sont enregistrées dans les plaines centrales de l'erg Chech et du Tanezrouft, ou dans les plaines orientales, au Fezzan (moins de 5 mm). Les moyennes n’ont d’ailleurs aucune signification, car la variabilité interannuelle des précipitations est très grande (159 mm à Tamenghest [Tamanrasset] une année, 6,4 mm une autre). Dans le Sahara septentrional, les pluies sont le plus souvent fines ; les pluies diluviennes y sont exceptionnelles, alors qu’elles sont plus fréquentes dans le Sahara central, où elles peuvent éventrer les maisons et transformer la palmeraie en bourbier. Au Nord, les pluies tombent à l'automne à l'Ouest, pendant l'hiver ou au printemps vers l'Est. Au Sud, les pluies de la mousson d'été s'avancent jusqu'au Zemmour à l'Ouest.
Dans les hauts massifs (Hoggar, Tibesti), des nuances climatiques apparaissent cependant avec l'altitude ; les précipitations sont plus fréquentes et les températures absolues moins fortes.
Des vents redoutables

Plus redoutées que les pluies, les tempêtes de sable peuvent provoquer des catastrophes. Elles se produisent généralement lorsqu’une dépression atlantique se rapproche de l’Afrique du Nord. L’alizé sec qui souffle du nord-est se transforme alors en vent venant du sud qui provoque une élévation de température (c’est la cheheli du Sahara du Nord, l’irifi du Sahara atlantique, le khamsin d’Égypte, le sirocco des Européens). La force de ce vent s’accroît, et un mur de sable qui peut cacher le soleil se forme à l’horizon.
De très fortes chaleurs

L'absence de nuages a pour conséquence une très forte insolation, le maximum d'ensoleillement étant enregistré à Adrar avec près de 4 000 heures par an. L’apport de chaleur solaire est maximal, et les 58 °C enregistrés à Aziziyya (Libye) le 3 septembre 1922 constituent un record mondial. En Algérie, à In-Salah, en 1941, le thermomètre n’est jamais descendu au-dessous de 48 °C pendant 45 jours de suite ; la moyenne du mois le plus chaud s’y établit à 36,8 °C. Les amplitudes des températures entre le jour et la nuit sont importantes (de 15 à 30 °C), mais, les maisons conservant la chaleur du jour, beaucoup d’oasiens dorment sur les terrasses ou sur le sable des dunes. En hiver, les moyennes de janvier s’établissent généralement entre 10 et 20 °C (12,1 °C à Timimoun, 20,9 °C à Faya, au Borkou), mais les minimums absolus inférieurs à 0 °C ne sont pas rares (2 ou 3 jours de gelée par an en moyenne à Timimoun), surtout dans les régions d’altitude élevée, où le thermomètre peut descendre à − 10 °C. D’une façon générale, l’amplitude annuelle est bien plus forte dans le Sahara du Nord (où elle peut même l’emporter sur l’amplitude diurne) que sur les marges du Sahara, où le gel est souvent inconnu. Sur la façade atlantique du Sahara, la proximité de l’océan entraîne un accroissement de l’humidité relative, une forte nébulosité, des précipitations occultes, mais les pluies ne se déclenchent pas par suite de l’existence du courant froid longeant la côte de l’Afrique (les vents humides de l’océan s’assèchent en pénétrant en été sur le continent surchauffé).
1.2. Le relief


Le Sahara est caractérisé par des horizons plats : plus de la moitié de la surface du désert est un reg, plaine semée ou non de cailloux laissés sur place par le vannage éolien. Les paysages sont immenses et monotones. Le Ténéré et le Tanezrouft ont une topographie quasi-plane. Le socle affleure à l’ouest, mais est couvert de sédiments principalement continentaux ailleurs.
Les montagnes, rares, correspondent à des bombements à grand rayon de courbure du socle qui réapparaît alors au milieu de sa couverture sédimentaire et est souvent surmonté de reliefs d’origine volcanique qui déterminent les points culminants (cas des aiguilles et des dykes de trachytes et de phonolites au Hoggar : Tahat, 2 818 m). Cette dorsale de terrains cristallins antécambriens se suit, d'Ouest en Est, par le Tiris, les Eglab, le Hoggar et le Tibesti. Le plus élevé de ces massifs est le Tibesti, dans le nord du Tchad, qui culmine à 3 415 m (Emi Koussi). D'immenses coulées volcaniques se sont étalées aussi en Libye et des manifestations éruptives d'importance plus réduite se sont produites jusqu'en Mauritanie. Dans les régions déprimées sont conservées des formations sédimentaires de couverture : grès primaires des plateaux de Mauritanie (Zemmour, Adrar et Tagant, djebel Hank), plateaux gréseux du pourtour du Hoggar (les tassilis, comme le tassili des Ajjer). grès du continental intercalaire (crétacé inférieur), marnes et calcaires du crétacé, dépôts éocènes de la cuvette du Tindouf, des plateaux du Tademaït algérien, de Tinghert, de la Hamada el-Homra, du Mezak, enfin formations tertiaires, généralement continentales.

Les plaines des régions cristallines sont dominées par des reliefs résiduels. Les plateaux sédimentaires sont limités par de longues falaises et leurs surfaces rocheuses et nues forment les hamadas tabulaires. Les hamadas sont une surface constituée par l’affleurement d’une couche résistante et correspondant souvent à un plateau en roche dure (calcaire pour la hamada el-Homra, en Libye, le Tademaït algérien).

Les dunes ne couvrent qu’une partie relativement modeste du Sahara (moins du cinquième). Elles sont rarement isolées (barkhanes) sauf dans le désert égyptien, mais se groupent fréquemment en massifs (ergs), formés par la réunion de cordons alignés parallèlement à la direction des vents dominants (nord-est) et séparés par des couloirs (feidj, lorsqu’ils sont creusés dans le sable ; gassi, si le plancher est un reg) qui servent de voies de passage pour les caravanes. Sur ces cordons, les dunes se rassemblent parfois en pyramides appelées ghroud (ghourd au singulier). Les ergs les plus importants sont situés dans le Sahara algérien (Grand Erg occidental et Grand Erg oriental), dans le Sahara central (erg Chech et ergs de Libye) ou dans le Sahara méridional (Ouaran).
Certaines régions sont situées au-dessous du niveau de la mer : les dépressions fermées à fond salé du sud de l’Aurès descendent jusqu’à − 31 m au chott Melrhir (le terme de chott désigne le pâturage situé au bord de ces dépressions, appelées sebkhas ; par extension, il désigne la sebkha elle-même). La dépression de Qattara, dans le nord-ouest de l’Égypte, est à − 133 m.
1.3. L'écoulement des eaux


Le Sahara est un désert sans écoulement extérieur : c'est le domaine de l’aréisme et de l’endoréisme. Pourtant, les marques de l’érosion fluviale sont nombreuses, et les réseaux de vallées témoignent de l’existence de climats plus humides dans le passé. Le Nil, né hors du Sahara, est le seul fleuve qui réussit à le traverser. Ailleurs, l'écoulement des oueds, encaissés dans des massifs montagneux, n'est que temporaire et se perd dans des dépressions fermées (endoréisme) où se trouvent des cuvettes salines (sebkha). Lorsque ces vallées n'ont pas d'écoulement superficiel, elles ont souvent un écoulement souterrain (inféroflux) et constituent une zone de prédilection pour la végétation à la recherche d’humidité.
1.4. La végétation et la faune

La rareté de la végétation

Puits dans le Sahara algérienPuits dans le Sahara algérien
La sécheresse explique la rareté de la végétation, souvent limitée dans les lits d'oueds, aux ergs ou diffuse en touffes espacées de graminées, de légumineuses ou de composées. La végétation est représentée par un petit nombre d’espèces. Les mêmes paysages végétaux, les mêmes associations sont rencontrés sur de vastes espaces. On y observe peu d'arbres (acacias, tamaris). L’adaptation à la sécheresse se traduit par la taille réduite des arbres et des arbustes, qui ne possèdent que de petites feuilles ou des épines (ce qui limite l’évaporation), alors que les racines sont très développées. Des arbustes isolés, comme les cyprès du Tassili ou les oliviers du Hoggar, subsistent dans des refuges particuliers. La strate basse est dispersée, plus variée, formée de graminées, de composées, de crucifères et d'ombellifères. Les épisodes pluviaux du Quaternaire ont entraîné une invasion de la flore méditerranéenne ou de la flore tropicale suivant les cas, et une grande partie de la flore est résiduelle. Celle-ci est ailleurs très rare et adaptée à la sécheresse (taille réduite, épines, racines très développées).
Au Nord, l'Atlas saharien marque la limite septentrionale du désert, qui atteint la mer en Libye et en Égypte. Au Sud, aucun accident de relief ne permet de fixer une limite bien tranchée : celle-ci est constituée par la bordure sahélienne, où apparaît le cram-cram (Cenchrus biflorus), graminée à graines piquantes typique du Sahel, qui nécessite des pluies d'été relativement régulières et forme alors un tapis continu, tandis que les touffes vertes du had (Cornulaca monacantha), qui caractérisent le désert, ont disparu. Mais la transition entre désert et steppe sahélienne est loin d’être brutale.
Une vie animale adaptée au milieu aride

Les animaux sont économes en eau, comme le dromadaire, rapides, comme le fennec; la gerboise, l'antilope addax, ou encore enterrés dans le sol durant le jour, comme la vipère à cornes. La vie animale est présente jusque dans les zones les plus arides, où peuvent vivre insectes, petits rongeurs (gerbille), hyènes, parfois gazelles et antilopes. Oryx, chacal, guépard, varan, scorpion, vipère des sables, daman des rochers complètent la liste des hôtes du désert. L'adax, grande antilope présente dans le Ténéré, peut rester plusieurs jours, voire une année entière, sans boire. Parmi les espèces adaptées au milieu aride se trouve aussi la grande gerboise, rongeur passant ses journées à l'abri dans un terrier.

Le fennec, petit renard aux grandes oreilles, est bien implanté. Le chameau, appelé ainsi bien qu'il s'agisse en fait d'un dromadaire (il n'a qu'une bosse), est le maître incontestable de l'endurance en milieu aride : il est, depuis qu'il a été importé d'Arabie pour remplacer le cheval, le « moteur » des routes caravanières.
1.5. Le Sahara au quaternaire

Le Sahara n'est pas un désert immuable. Divers indices témoignent de périodes plus humides durant lesquelles la zone aride a changé d'emplacement, se rétractant ou se déplaçant vers le sud ou vers le nord.
Ce grand désert a probablement connu plusieurs périodes humides pendant le quaternaire, comme en témoigne l'organisation en réseau hydrographique d'innombrables vallées sèches et d'îlots de végétation.
2. Population et économie

2.1. La population


On estime à environ 1,5 à 2 millions le nombre d'habitants au Sahara (vallée du Nil exclue), dont la moitié environ de nomades. Mais le nombre de ces derniers diminue sans cesse, au fur et à mesure que l'économie moderne pénètre le désert et que l'administration des États sahariens accroît son emprise, amenant les nomades à abandonner leur genre de vie traditionnel pour se fixer près des localités déjà occupées par les sédentaires. Cet abandon des activités pastorales peut passer par un stade intermédiaire de semi-nomadisme, mais il correspond souvent à un processus de prolétarisation, car les nomades sont mal adaptés à leur nouvelle vie : aristocrates du désert, souvent réfractaires à tout travail manuel, ils vivent aujourd'hui misérablement.

Les zones de peuplement anciennes et actuelles des TouaregLes zones de peuplement anciennes et actuelles des Touareg
Trois groupes humains vivent au Sahara : Tedas, Touareg, Maures.
2.2. L'agriculture


L’agriculture n’est possible que s’il y a irrigation ou au moins présence d’une nappe phréatique. Aussi les zones cultivées sont-elles ponctuelles et restreintes aux oasis. C’est là que vivent les sédentaires, dans des villages (ksur, singulier ksar) aux maisons construites en briques d’argile pure (tin) ou d’un mélange d’argile et de paille (toub). Le toit est constitué par une terrasse.

Une typologie des oasis peut reposer sur les procédés d’irrigation. Certaines oasis cultivent en bour (sans irrigation), car la nappe phréatique est proche de la surface (c’est le cas des palmeraies du Fezzan, en Libye). Dans le Souf, en Algérie, on creuse des dans le sable des entonnoirs d’une quinzaine de mètres de profondeur, ce qui permet aux palmiers qu’on y place d’avoir leurs racines à l’humidité. Sur le rebord de l’Atlas, les oasis du Draa, au Maroc, s’étirent le long des rivières descendues de la montagne et sont ainsi toujours alimentées en eau par simple dérivation (seguia). Les sources sont plus rares, mais Rhadamès, Djanet sont arrosées de cette manière.

Palmeraie et puits à poulie à GuerraraPalmeraie et puits à poulie à Guerrara
Les puits à traction animale sont très répandus dans le Mzab, et les puits à balancier se rencontrent dans tout le Sahara (Saoura, Touat…). Les oasis situées sur le pourtour du plateau de Tademaït utilisent largement les galeries souterraines (foggaras). Le palmier-dattier (Phoenix dactylifera) constitue la ressource essentielle (les oasis de l'oued Rhir, en Algérie, constituent l'une des premières zones productrices de dattes du monde), mais il est complété par la culture de céréales : blé et orge au nord, sorgho et petit mil au sud, encore que le blé soit cultivé en pleine zone sahélienne. S’ajoutent divers légumes (fèves, pois, lentilles dans le Sahara du Nord, haricots au Fezzan, pour ce qui concerne les légumes d’hiver ; courge, melon, pastèque, tomate, piment en été). On trouve aussi des plantes non alimentaires : tabac en particulier dans le Souf et le Touat. Toutes les pratiques culturales se font à la main sur des exploitations minuscules, qui sont généralement insuffisantes pour assurer la subsistance des exploitants, surtout que ceux-ci, généralement, ne sont pas propriétaires, mais métayers (khanmès) ou journaliers et doivent payer une redevance pour l’utilisation de l’eau.
2.3. Les ressources minières


C'est l'exploitation des ressources minières qui a permis une intégration véritable du Sahara dans l'économie moderne. Grâce à l'Algérie et à la Libye, le Sahara fournit du pétrole et du gaz naturel. Grâce au Sahara occidental, il produit du phosphate et grâce à l'Aïr (Niger), il fournit de l'uranium. Le Sahara recèle du minerai de fer ; seule la Mauritanie en exploite.

 

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INTELLIGENCE ARTIFICIELLE

 


 

 

 

intelligence artificielle

Ensemble de théories et de techniques mises en œuvre en vue de réaliser des machines capables de simuler l'intelligence humaine.
Avec l'intelligence artificielle, l'homme côtoie un de ses rêves prométhéens les plus ambitieux : fabriquer des machines dotées d'un « esprit » semblable au sien. Pour John MacCarthy, l'un des créateurs de ce concept, « toute activité intellectuelle peut être décrite avec suffisamment de précision pour être simulée par une machine ». Tel est le pari – au demeurant très controversé au sein même de la discipline – de ces chercheurs à la croisée de l'informatique, de l'électronique et des sciences cognitives.
Malgré les débats fondamentaux qu'elle suscite, l'intelligence artificielle a produit nombre de réalisations spectaculaires, par exemple dans les domaines de la reconnaissance des formes ou de la voix, de l'aide à la décision ou de la robotique.
Intelligence artificielle et sciences cognitives

Au milieu des années 1950, avec le développement de l'informatique naquit l'ambition de créer des « machines à penser », semblables dans leur fonctionnement à l'esprit humain. L'intelligence artificielle (IA) vise donc à reproduire au mieux, à l'aide de machines, des activités mentales, qu'elles soient de l'ordre de la compréhension, de la perception, ou de la décision. Par là même, l'IA est distincte de l'informatique, qui traite, trie et stocke les données et leurs algorithmes. Le terme « intelligence » recouvre ici une signification adaptative, comme en psychologie animale. Il s'agira souvent de modéliser la résolution d'un problème, qui peut être inédit, par un organisme. Si les concepteurs de systèmes experts veulent identifier les savoirs nécessaires à la résolution de problèmes complexes par des professionnels, les chercheurs, travaillant sur les réseaux neuronaux et les robots, essaieront de s'inspirer du système nerveux et du psychisme animal.


Les sciences cognitives

Dans une optique restrictive, on peut compter parmi elles :
– l'épistémologie moderne, qui s'attache à l'étude critique des fondements et méthodes de la connaissance scientifique, et ce dans une perspective philosophique et historique ;
– la psychologie cognitive, dont l'objet est le traitement et la production de connaissances par le cerveau, ainsi que la psychologie du développement, quand elle étudie la genèse des structures logiques chez l'enfant ;
– la logique, qui traite de la formalisation des raisonnements ;
– diverses branches de la biologie (la biologie théorique, la neurobiologie, l'éthologie, entre autres) ;
– les sciences de la communication, qui englobent l'étude du langage, la théorie mathématique de la communication, qui permet de quantifier les échanges d'informations, et la sociologie des organisations, qui étudie la diffusion sociale des informations.
Le projet et son développement

L'IA trouve ses racines historiques lointaines dans la construction d'automates, la réflexion sur la logique et sa conséquence, l'élaboration de machines à calculer.
Les précurseurs
Dès l'Antiquité, certains automates atteignirent un haut niveau de raffinement. Ainsi, au ier s. après J.-C., Héron d'Alexandrie inventa un distributeur de vin, au fonctionnement cybernétique avant la lettre, c'est-à-dire doté de capacités de régulation, et fondé sur le principe des vases communicants. Rapidement, les savants semblèrent obsédés par la conception de mécanismes à apparence animale ou humaine. Après les essais souvent fructueux d'Albert le Grand et de Léonard de Vinci, ce fut surtout Vaucanson qui frappa les esprits, en 1738, avec son Canard mécanique, dont les fonctions motrices et d'excrétion étaient simulées au moyen de fins engrenages. Quant à la calculatrice, elle fut imaginée puis réalisée par Wilhelm Schickard (Allemagne) et Blaise Pascal (France). Vers la même époque, l'Anglais Thomas Hobbes avançait dans son Léviathan l'idée que « toute ratiocination est calcul », idée qui appuyait le projet de langage logique universel cher à René Descartes et à Gottfried W. Leibniz. Cette idée fut concrétisée deux siècles plus tard par George Boole, lorsqu'il créa en 1853 une écriture algébrique de la logique. On pouvait alors espérer passer de la conception de l'animal-machine à la technologie de la machine-homme.
Naissance et essor de l'informatique
À partir de 1835, le mathématicien britannique Charles Babbage dressa avec l'aide de lady Ada Lovelace les plans de la « machine analytique », ancêtre de tous les ordinateurs, mais sans parvenir à la réaliser. Seul l'avènement de l'électronique, qui engendra d'abord les calculateurs électroniques du type ENIAC (electronic numerical integrator and computer) dans les années 1940, permit aux premières machines informatiques de voir enfin le jour, autour de 1950, avec les machines de Johann von Neumann, un mathématicien américain d'origine hongroise. Les techniques de l'informatique connurent des progrès foudroyants – ainsi, à partir de 1985, un chercheur américain conçut des connection machines, ensembles de micro-ordinateurs reliés entre eux qui effectuaient 1 000 milliards d'opérations par seconde –, et continuent aujourd'hui encore à enrichir l'IA.
La création, à partir des années 1990, des « réalités virtuelles », systèmes qui par l'intermédiaire d'un casque et de gants spéciaux donnent à l'utilisateur l'impression de toucher et de manipuler les formes dessinées sur l'écran, ainsi que les travaux sur les « hypertextes », logiciels imitant les procédés d'associations d'idées, vont également dans ce sens.
Le fondateur
Un des théoriciens précurseurs de l'informatique, le mathématicien britannique Alan M. Turing, lança le concept d'IA en 1950, lorsqu'il décrivit le « jeu de l'imitation » dans un article resté célèbre. La question qu'il posait est la suivante : un homme relié par téléimprimante à ce qu'il ignore être une machine disposée dans une pièce voisine peut-il être berné et manipulé par la machine avec une efficacité comparable à celle d'un être humain ? Pour Turing, l'IA consistait donc en un simulacre de psychologie humaine aussi abouti que possible.
Mise en forme de l'IA
La relève de Turing fut prise par Allen Newell, John C. Shaw et Herbert A. Simon, qui créèrent en 1955-1956 le premier programme d'IA, le Logic Theorist, qui reposait sur un paradigme de résolution de problèmes avec l'ambition – très prématurée – de démontrer des théorèmes de logique. En 1958, au MIT (Massachusetts Institute of Technology), John MacCarthy inventa le Lisp (pour list processing), un langage de programmation interactif : sa souplesse en fait le langage par excellence de l'IA (il fut complété en 1972 par Prolog, langage de programmation symbolique qui dispense de la programmation pas à pas de l'ordinateur).
L'élaboration du GPS (general problem solver) en 1959 marque la fin de la première période de l'IA. Le programme GPS est encore plus ambitieux que le Logic Theorist, dont il dérive. Il est fondé sur des stratégies logiques de type « analyse des fins et des moyens » : on y définit tout problème par un état initial et un ou plusieurs états finaux visés, avec des opérateurs assurant le passage de l'un à l'autre. Ce sera un échec, car, entre autres, le GPS n'envisage pas la question de la façon dont un être humain pose un problème donné. Dès lors, les détracteurs se feront plus virulents, obligeant les tenants de l'IA à une rigueur accrue.
Les critiques du projet

Entre une ligne « radicale », qui considère le système cognitif comme un ordinateur, et le point de vue qui exclut l'IA du champ de la psychologie, une position médiane est certainement possible. Elle est suggérée par trois grandes catégories de critiques.
Objection logique
Elle repose sur le célèbre théorème que Kurt Gödel a énoncé en 1931. Celui-ci fait ressortir le caractère d'incomplétude de tout système formel (tout système formel comporte des éléments dotés de sens et de définitions très précis, mais dont on ne peut démontrer la vérité ou la fausseté : ils sont incomplets). Il serait alors vain de décrire l'esprit en le ramenant à de tels systèmes. Cependant, pour certains, rien n'indique que le système cognitif ne soit pas à considérer comme formel, car si l'on considère à la suite du philosophe autrichien Ludwig Wittgenstein qu'un être vivant est un système logique au même titre qu'une machine, on peut concevoir que l'esprit est « formel », qu'il connaît des limites, comme toute machine.
Objection épistémologique
Un certain nombre de biologistes et d'informaticiens jugent l'IA classique prématurément ambitieuse. Pour eux, il faut d'abord parvenir à modéliser le fonctionnement de niveaux d'intégration du vivant plus simples (comportement d'animaux « simples », collecte d'informations par le système immunitaire ou encore communications intercellulaires) avant de s'attaquer à l'esprit humain.
Objection philosophique
Pour John R. Searle, le système cognitif de l'homme est fondamentalement donneur de sens. Or la machine ne possède pas d'intentionnalité ; elle n'a pas de conscience. Un ordinateur peut manipuler des symboles mais ne peut les comprendre. Ainsi, l'IA travaillerait sur la syntaxe des processus de raisonnement (les règles combinatoires), pas sur leur sémantique (l'interprétation et la signification).
Hilary Putnam juge fallacieuse la description de la pensée faite par l'IA en termes de symboles et de représentations. Pour lui, une telle approche suppose une signification préétablie, alors que tout serait dans l'interprétation que fait l'esprit de la « réalité » extérieure. L'histoire des idées montre ainsi que la notion de « matière » n'a pas le même sens pour les philosophes de l'Antiquité grecque et pour les physiciens modernes. De même, de nombreux biologistes considèrent que les systèmes nerveux des différentes espèces animales font émerger de leur environnement des univers distincts. L'IA ignorerait donc ce phénomène de « construction active » de réalités multiples par le système cognitif.
Enfin, dans Ce que les ordinateurs ne peuvent pas faire (1972), Hubert L. Dreyfus souligne que la compréhension stricto sensu implique tout un sens commun. Faute de cerner de façon adéquate cette question, les programmes d'IA relèveraient de la contrefaçon – en revanche, le même auteur est assez séduit par les recherches sur les réseaux neuronaux.
La résolution de problèmes

Pour l'épistémologue Karl Popper, tout animal, en tant qu'être adapté à son milieu, est un problem solver. Si la résolution de problèmes n'est sans doute pas la seule marque fonctionnelle saillante de l'esprit humain, elle reste incontournable pour le modélisateur. Deux approches sont possibles dans la résolution d'un problème : celle de l'algorithme et celle de l'heuristique.


Algorithmes et heuristique

Les algorithmes sont des procédures mathématiques de résolution. Il s'agit d'une méthode systématique, qui donne par conséquent des résultats fiables. Mais une lourdeur déterministe marque ses limites. En l'employant pour certains problèmes, on peut en effet se trouver confronté au phénomène d'« explosion combinatoire ». Ce dernier cas est illustré par la fable indienne du « Sage et de l'Échiquier ». À un Sage, qui l'avait conseillé de manière avisée, le Roi proposa de choisir une récompense. Le vieil homme demanda simplement que l'on apporte un échiquier et que l'on dépose sur la première case un grain de blé, sur la seconde deux grains, et ainsi de suite, en mettant sur chaque nouvelle case une quantité de blé double de celle déposée sur la case précédente. Avec un rapide calcul, on imagine que le Roi regretta bien vite d'avoir accordé un don qui se révélait très coûteux, si ce n'est impossible, à honorer.
À l'opposé, l'heuristique est une méthode stratégique indirecte, qu'on utilise dans la vie courante. Elle résulte du choix, parmi les approches de la résolution, de celles qui paraissent les plus efficaces. Si son résultat n'est pas garanti, car elle n'explore pas toutes les possibilités, mais seulement les plus favorables, elle n'en fait pas moins gagner un temps considérable : lors de la résolution de problèmes complexes, l'usage de l'algorithme est impossible.
Le cas exemplaire du jeu d'échecs

De tous les jeux, ce sont les échecs qui ont suscité les plus gros efforts de modélisation en IA. Dès 1957, l'informaticien Bernstein, sur la base des réflexions de Claude Shannon, l'un des pères de la Théorie de l'information, mit au point un programme pour jouer deux parties. Le programme GPS, en lequel Simon voyait la préfiguration d'un futur champion du monde électronique, annoncé à grand fracas pour l'année 1959, fut battu par un adolescent en 1960. À partir de cette époque fut développée toute la série des Chess Programs, jugés plus prometteurs. Pourtant ceux-ci reflètaient de manière plus que déficiente les heuristiques globalisantes des bons joueurs : en effet, dans ces jeux automatiques, les coups réguliers sont programmés sous forme d'algorithmes. Contrairement à la célèbre formule d'un champion des années 1930 : « Je n'étudie qu'un coup : le bon », l'ordinateur n'envisage pas son jeu à long terme ; il épuise successivement tous les états possibles d'un arbre mathématique. Son atout majeur est la « force brutale » que lui confèrent sa puissance et sa vitesse de calcul. Ainsi Belle, ordinateur admis en 1975 dans les rangs de la Fédération internationale d'échecs, pouvait déjà calculer 100 000 coups par seconde. Néanmoins, les programmes électroniques d'alors étaient encore systématiquement surpassés par les maîtres.

image: http://www.larousse.fr/encyclopedie/data/images/1004375-Gary_Kasparov.jpg
Gary KasparovGary Kasparov
Deep Thought, un supercalculateur d'IBM, fut encore battu à plate couture en octobre 1989 par le champion du monde Garri Kasparov (la machine n'avait encore à cette époque qu'une capacité de jeu de 2 millions de coups par seconde). Ce projet Deep Thought avait mis en œuvre un budget de plusieurs millions de dollars et des ordinateurs hyperperformants, et bénéficié des conseils du grand maître américano-soviétique Maxim Dlugy. Les machines employées étaient encore algorithmiques, mais faisaient moins d'erreurs et effectuaient des calculs plus fins. L'équipe de Deep Thought chercha à dépasser le seuil du milliard de coups par seconde, car leur ordinateur ne calculait qu'environ cinq coups à l'avance, bien moins que leur concurrent humain : les connaisseurs estimèrent qu'il fallait porter ce chiffre à plus de sept coups. En fait, il apparut qu'il fallait concevoir des machines stratèges capables, en outre, d'apprentissage. Feng Hsiung Hsu et Murray Campbell, des laboratoires de recherche d'IBM, associés, pour la réalisation de la partie logicielle, au Grand-maître d'échecs Joël Benjamin, reprirent le programme Deep Thought – rebaptisé Deep Blue, puis Deeper Blue – en concevant un système de 256 processeurs fonctionnant en parallèle ; chaque processeur pouvant calculer environ trois millions de coups par seconde, les ingénieurs de Deeper Blue estiment qu'il calculait environ 200 millions de coups par seconde. Finalement, le 11 mai 1997, Deeper Blue l'emporta sur Garri Kasparov par 3 points et demi contre 2 points et demi, dans un match en six parties. Même si beaucoup d'analystes sont d'avis que Kasparov (dont le classement ELO de 2820 est pourtant un record, et qui a prouvé que son titre de champion du monde est incontestable en le défendant victorieusement par six fois) avait particulièrement mal joué, la victoire de Deeper Blue a enthousiasmé les informaticiens. Un des coups les plus étonnants fut celui où, dans la sixième partie, la machine choisit, pour obtenir un avantage stratégique, de faire le sacrifice spéculatif d'un cavalier (une pièce importante), un coup jusque-là normalement « réservé aux humains ». En 2002, le champion du monde Vladimir Kramnik ne parvenait qu'à faire match nul contre le logiciel Deep Fritz, au terme de huit parties, deux victoires pour l'humain et la machine et quatre matchs nuls. Une nouvelle fois, la revanche des neurones sur les puces n'avait pas eu lieu.
En 2016, le programme Alphago de Google Deepmind bat l'un des meilleurs joueurs mondiaux du jeu de go, Lee Sedol (ce jeu d'origine chinoise comprend bien plus de combinaisons que les échecs).
Les réseaux neuronaux

Dans un article paru en 1943, Warren McCulloch, un biologiste, et Walter Pitts, un logicien, proposaient de simuler le fonctionnement du système nerveux avec un réseau de neurones formels. Ces « neurones logiciens » sont en fait des automates électroniques à seuil de fonctionnement 0/1, interconnectés entre eux. Ce projet, s'il n'eut pas d'aboutissement immédiat, devait inspirer plus tard Johann von Neumann lorsqu'il créa l'architecture classique d'ordinateur.
Une première tentative infructeuse

Il fallut attendre 1958 pour que les progrès de l'électronique permettent la construction du premier réseau neuronal, le Perceptron, de Frank Rosenblatt, machine dite connectionniste. Cette machine neuromimétique, dont le fonctionnement (de type analogique) cherche à approcher celui du cerveau humain, est fort simple. Ses « neurones », reliés en partie de manière aléatoire, sont répartis en trois couches : une couche « spécialisée » dans la réception du stimulus, ou couche périphérique, une couche intermédiaire transmettant l'excitation et une dernière couche formant la réponse. Dans l'esprit de son inventeur, le Perceptron devait être capable à brève échéance de prendre en note n'importe quelle conversation et de la restituer sur imprimante. Quantité d'équipes travailleront au début des années 1960 sur des machines similaires, cherchant à les employer à la reconnaissance des formes : ce sera un échec total, qui entraînera l'abandon des travaux sur les réseaux. Ceux-ci semblent alors dépourvus d'avenir, malgré la conviction contraire de chercheurs comme Shannon.
Les réseaux actuels

En fait, l'avènement des microprocesseurs, les puces électroniques, permettra la réapparition sous forme renouvelée des réseaux à la fin des années 1970, générant un nouveau champ de l'IA en pleine expansion, le néoconnectionnisme. Les nouveaux réseaux, faits de processeurs simples, ne possèdent plus de parties à fonctions spécialisées. On leur applique un outillage mathématique issu pour l'essentiel de la thermodynamique moderne et de la physique du chaos.
Le cerveau humain est caractérisé par un parallélisme massif, autrement dit la possibilité de traiter simultanément quantité de signaux. Dans les réseaux aussi, de nombreux composants électroniques, les neuromimes, travaillent de manière simultanée, et la liaison d'un neuromime avec d'autres est exprimée par un coefficient numérique, appelé poids synaptique. On est cependant bien loin du système nerveux central de l'homme, qui comprend environ 10 milliards de cellules nerveuses et 1 million de milliards de synapses (ou connexions). Contrairement à ce qui se passe dans le cerveau, lors de l'envoi d'un signal les neuromimes activent toujours leurs voisins et n'ont pas la possibilité d'inhiber le fonctionnement de ceux-ci. Néanmoins, ces machines sont dotées de la capacité d'auto-organisation, tout comme les êtres vivants : elles ne nécessitent pas de programmation a posteriori. La mémoire peut survivre à une destruction partielle du réseau ; leurs capacités d'apprentissage et de mémorisation sont donc importantes. Si un micro-ordinateur traite l'information 100 000 fois plus vite qu'un réseau, ce dernier peut en revanche effectuer simultanément plusieurs opérations.
Quelques applications

La reconnaissance des formes (pattern recognition) est, avec celle du langage naturel, l'un des domaines où les réseaux excellent. Pour reconnaître des formes, un robot classique les « calculera » à partir d'algorithmes. Tous les points de l'image seront numérisés, puis une mesure des écarts relatifs entre les points sera faite par analyse de réflectance (rapport entre lumière incidente et lumière reflétée). Mieux encore, on mesurera l'écart absolu de chaque point par rapport à la caméra qui a fixé l'image.
Ces méthodes, qui datent de la fin des années 1960, sont très lourdes et s'avèrent inopérantes lorsque l'objet capté par la caméra se déplace. Le réseau, s'il n'est guère efficace pour un calcul, reconnaîtra une forme en moyenne 10 000 fois plus vite que son concurrent conventionnel. En outre, grâce aux variations d'excitation de ses « neurones », il pourra toujours identifier un visage humain, quels que soient ses changements d'aspect. Cela rappelle les caractéristiques de la mémoire associative humaine, qui coordonne de façon complexe des caractéristiques ou informations élémentaires en une structure globale mémorisée. Une autre ressemblance avec le système cognitif de l'homme est à relever : sur cent formes apprises à la suite, l'ordinateur neuronal en retiendra sept. Or, c'est là approximativement la « taille » de la mémoire à court terme, qui est de six items.
Les rétines artificielles, apparues en 1990, rendront progressivement obsolète la caméra en tant que principal capteur employé en robotique. Tout comme les cônes et les bâtonnets de l'il, ces « rétines » à l'architecture analogique transforment les ondes lumineuses en autant de signaux électriques, mais elles ignorent encore la couleur. Certaines d'entre elles ont la capacité de détecter des objets en mouvement. De telles membranes bioélectroniques seront miniaturisables à assez brève échéance.
Enfin, les réseaux de neurones formels sont aussi de formidables détecteurs à distance d'ultrasons ou de variations thermiques.
À l'aide d'un ordinateur classique, il est possible de simuler une lecture de texte avec un logiciel de reconnaissance de caractères, un lecteur optique et un système de synthèse vocale qui dira le texte. Mais certains ordinateurs neuronaux sont aussi capables de dispenser un véritable enseignement de la lecture. De même, couplé à un logiciel possédant en mémoire une vingtaine de voix échantillonnées dans une langue, un réseau forme un système efficace d'enseignement assisté par ordinateur, qui est capable de corriger l'accent de ses élèves !
Intelligence artificielle et éducation
À travers le langage logo, conçu par Seymour Papert (Max Planck Institute), l'IA a doté la pédagogie des jeunes enfants d'un apport majeur. En permettant une programmation simple, logo incite l'enfant à mieux structurer ses rapports aux notions d'espace et de temps, à travers des jeux. L'idée clé de logo repose sur le constat fait par Jean Piaget : l'enfant assimile mieux les connaissances quand il doit les enseigner à autrui, en l'occurrence à l'ordinateur, en le programmant.
Bien que cet outil informatique contribue à combler les retards socioculturels de certains jeunes, il est douteux, contrairement au souhait de ses promoteurs, qu'il puisse aider des sujets à acquérir des concepts considérés comme l'apanage de leurs aînés de plusieurs années. Les travaux de Piaget montrent en effet que les structures mentales se constituent selon une chronologie et une séquence relativement définies. Quelle que soit l'excellence d'une méthode, on ne peut pas enseigner n'importe quoi à n'importe quel âge.
Perspectives

La prise en compte de la difficulté à modéliser parfaitement l'activité intellectuelle a conduit certains praticiens de l'IA à rechercher des solutions beaucoup plus modestes mais totalement abouties, en particulier dans certaines applications de la robotique.
L'IA sans représentation de connaissance

Vers 1970, les conceptions théoriques de Marvin Minsky et Seymour Papert sur la « Société de l'esprit », parmi d'autres, ont fondé une nouvelle IA, l'IA distribuée, dite encore IA multiagents. Les tenants de cette approche veulent parvenir à faire travailler ensemble, et surtout de manière coordonnée, un certain nombre d'agents autonomes, robots ou systèmes experts, à la résolution de problèmes complexes.
Après avoir conçu des ensembles de systèmes experts simples associés, l'IA distribuée a également remodelé le paysage de la robotique, générant une IA sans représentation de connaissance.
Les robots dits de la troisième génération sont capables, une fois mis en route, de mener à bien une tâche tout en évitant les obstacles rencontrés sur leur chemin, sans aucune interaction avec l'utilisateur humain. Ils doivent cette autonomie à des capteurs ainsi qu'à un générateur de plans, au fonctionnement fondé sur le principe du GPS. Mais, à ce jour, les robots autonomes classiques restent insuffisamment aboutis dans leur conception.
Ce type de robotique semble à vrai dire à l'heure actuelle engagé dans une impasse : depuis le début des années 1980, aucun progrès notable ne s'est fait jour.
L'« artificial life »
Le philosophe Daniel C. Dennett a proposé, à la fin des années 1980, une nouvelle direction possible pour la robotique. Plutôt que de s'inspirer de l'homme et des mammifères, il conseille d'imiter des êtres moins évolués, mais de les imiter parfaitement. Valentino Braitenberg s'était déjà engagé dans une voie similaire au Max Planck Institute, une dizaine d'années auparavant, mais ses machines relevaient d'une zoologie imaginaire. En revanche, depuis 1985, Rodney Brooks, du MIT, fabrique des robots à forme d'insecte ; ce sont les débuts de ce qu'on appelle artificial life.
Cette idée a été réalisable grâce à la réduction progressive de la taille des composants électroniques. Une puce de silicium sert donc de système nerveux central aux insectes artificiels de Brooks : pour l'instant, le plus petit d'entre eux occupe un volume de 20 cm3. Le chercheur est parti d'un constat simple : si les invertébrés ne sont guère intelligents, ils savent faire quantité de choses, et sont en outre extrêmement résistants. Travaillant sur la modélisation de réflexes simples de type stimulus-réponse, Brooks élude ainsi élégamment le problème, classique en IA, de la représentation des connaissances. Dans l'avenir, il voudrait faire travailler ses robots en colonies, comme des fourmis ou des abeilles ; ses espoirs aboutiront seulement si la miniaturisation des moteurs progresse. L'éthologie, ou science des comportements animaux, fait ainsi une entrée remarquée dans le monde de l'IA.

 

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SECONDE GUERRE MONDIALE

 

 

 

 

 

Seconde Guerre mondiale

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Seconde Guerre mondiale
Conflit planétaire qui, de 1939 à 1945, opposa les puissances démocratiques alliées (Pologne, Grande-Bretagne et pays du Commonwealth, France, Danemark, Norvège, Pays-Bas, Belgique, Yougoslavie, Grèce, puis URSS, États-Unis, Chine, et la plupart des pays de l'Amérique latine) aux puissances totalitaires de l'Axe (Allemagne, Italie, Japon et leurs satellites, Hongrie, Slovaquie, etc.).
Introduction
La Seconde Guerre mondiale, qui coûta la vie de plus de 40 millions de personnes, a duré six ans, du 1er septembre 1939, date de l'agression allemande contre la Pologne, au 2 septembre 1945, jour où le Japon capitula. Circonscrite à l'origine à l'Europe, elle devient véritablement mondiale avec l'entrée dans la guerre, en 1941, de l'URSS, du Japon et des États-Unis.

Le nombre des belligérants, la nature et la puissance des moyens mis en œuvre, le caractère idéologique du conflit donneront plus d'ampleur encore à cet affrontement qu'à celui de 1914-1918. On y distinguera deux immenses théâtres d'opérations. Le premier, centré sur l'Europe, va de l'Atlantique inclus à la Volga et de l'océan Arctique à l'Afrique équatoriale ; le second, axé sur le Japon, englobe le Pacifique, l'Inde, la Chine et le Sud-Est asiatique. En dehors de quelques États d'Amérique latine et de quelques îlots européens (Espagne, Portugal, Suède, Suisse), toutes les nations du monde et leurs dépendances entreront peu à peu dans la guerre.
Si quelques « têtes » dominent particulièrement ce conflit (→ Churchill, Hitler, Roosevelt, Staline), ils le doivent évidemment à leur forte personnalité, mais aussi à l'importance des ressources humaines, économiques, scientifiques et techniques que leur pays mettra à leur disposition.

Les historiens s'accordent à discerner deux parties dans le déroulement de cette guerre.
La première, qui s'étend jusqu'à la fin de 1942, est marquée par le flux conquérant des puissances de l'Axe (Allemagne, Italie, Japon). Un terme y sera mis dans le Pacifique par l'échec naval japonais de l'archipel des Midway, en Afrique par la bataille d'El-Alamein et le débarquement allié au Maroc et en Algérie, en URSS par le désastre de la Wehrmacht à Stalingrad.
Dans une seconde partie, les Alliés reprennent l'initiative et la direction du conflit, puis, refoulant systématiquement le Japon dans le Pacifique et débarquant en Europe, contraindront d'abord l'Italie (1943), puis l'Allemagne et le Japon (1945) à la capitulation.
1. Les origines du conflit
1.1. Les excès du traité de Versailles

À l'issue de la Première Guerre mondiale, le traité de Versailles de 1919 a été considéré par l’Allemagne comme un diktat, qui la condamne à reconnaître sa responsabilité unilatérale dans le déclenchement de la guerre, à payer au titre de « réparations » pour les dommages causés aux personnes et aux biens (une somme qui implique des versements échelonnés jusqu'en 1988), à subir des amputations de territoires à l'est et une limitation de sa souveraineté à l'ouest (démilitarisation de la Rhénanie).
Mais on ne peut imputer aux seuls excès du traité la responsabilité de cette nouvelle guerre. Sans doute, l'épuisement économique et démographique des vainqueurs de 1918, leurs divisions (et notamment la crainte de l'Angleterre de voir la France trop puissante), l'éclatement de l'Europe danubienne en de nouveaux États aux frontières contestables et contestées, l'impuissance d'une Société des Nations (SDN) imposée mais aussitôt refusée par les États-Unis, la crise économique mondiale de 1929, enfin, constitueront autant de facteurs accentuant la fragilité du nouvel équilibre international.
1.2. La responsabilité de l'Allemagne nazie
Il n'empêche que c'est d'abord à l'Allemagne d'Adolf Hitler qu'appartient la responsabilité fondamentale de ce conflit.
Soulevé par la mystique du national-socialisme, Hitler est installé en 1933 au pouvoir par le président Hindenburg dans un pays rongé par le chômage et les conséquences économiques et sociales d'une inflation catastrophique. Son objectif est d'effacer le diktat de Versailles et d'assurer à l'Allemagne l'« espace vital » nécessaire à son expansion démographique : le réarmement va donc lui servir à la fois à préparer les conditions d'un changement politique et à remédier à la crise.
Quelques années plus tard commencera la folle aventure de ses coups de force, auxquels la faiblesse et les illusions de l'Angleterre et de la France ne répondront que par autant de renoncements. En particulier, leur absence de riposte à la réoccupation de la rive gauche du Rhin par la Wehrmacht – en violation du traité de Versailles –, le 7 mars 1936 retirait aux démocraties occidentales tout moyen de coercition à l'égard de l'Allemagne nazie.
1.3. Le rapprochement de Mussolini vers l'Allemagne nazie
En Italie, Mussolini a pris le pouvoir dès 1922, dans un pays qui s'estime lésé par les traités de 1919 et de 1920 : les accords avec l'Autriche-Hongrie et la Yougoslavie ne répondent pas aux promesses faites par les Alliés le 26 avril 1915 (traité de Londres), lorsqu'ils avaient détaché l'Italie de la Triplice. Pourtant, lors de la conférence de Stresa (avril 1935), Mussolini conclut avec la Grande-Bretagne et la France une entente qui stipule que les trois pays s'opposeront à toute modification des traités. Mais, contré par la Grande-Bretagne et la France lors de l'affaire éthiopienne (→ campagnes d'Éthiopie, octobre 1935), Mussolini se rapproche de Hitler et dénonce les accords de Stresa.
1.4. L'expansionnisme nippon
Au même moment s'affirmaient en Extrême-Orient les visées expansionnistes de l'empire japonais. Ayant imposé son protectorat à la Mandchourie, occupé la province chinoise de Jehol et quitté la SDN (1933), le Japon entre en 1937 en guerre avec la Chine ; il occupe rapidement Shanghai, Nankin et les principaux ports du Sud-Est (1939), refoulant à Chongqing Tchang Kaï-chek.
L'extension de l'influence nippone dans le Pacifique ne provoque aucune réaction des États-Unis, alors entièrement absorbés par le redressement de leur économie et qui n'interviendront pratiquemen pas dans la crise internationale d'où sortira la Seconde Guerre mondiale.
Pour en savoir plus, voir l'article guerres sino-japonaises.
2. Le déclenchement de la guerre
2.1. La violation des accords de Munich par Hitler

Mais c'est dans la vieille Europe que les exigences démesurées du dictateur allemand, encouragé par la démission des démocraties occidentales, allumeront le conflit.
Après s'être habilement assuré à l'automne de 1936 du soutien politique du Japon par la signature du pacte Antikomintern, dirigé contre l'URSS, et de l'alliance de l'Italie fasciste par la constitution de l'Axe Berlin-Rome, Hitler annexe l'Autriche en mars 1938 (Anschluss). La guerre est évitée de justesse par les accords de Munich (septembre), qui, en acceptant l'incorporation au Reich du territoire des Sudètes, amorcent le démembrement de la Tchécoslovaquie.
Dès mars 1939, ces accords sont violés par Hitler, dont les troupes entrent à Prague, tandis que Mussolini, un mois plus tard, annexe l'Albanie, puis signe avec Hitler le 22 mai 1939 le pacte d'Acier (→ traité de Berlin), qui enchaîne inconditionnellement l'Italie à l'Allemagne.
Cette fois, Paris et Londres décident enfin de résister. Aussi, quand Berlin somme brusquement Varsovie, le 25 mars 1939, de soumettre à un aménagement le statut de Dantzig et du corridor (→ Gdańsk), Londres prépare-t-il avec diligence un traité d'alliance avec la Pologne, et Paris confirme le sien. Les deux capitales étendent leurs garanties à la Roumanie et à la Grèce le 13 avril. Un accord semblable est conclu entre la Grande-Bretagne, la France et la Turquie, le 19 octobre, après la cession à Ankara du sandjak d'Alexandrette (aujourd'hui Iskenderun), détaché de la Syrie alors sous protectorat français.
2.2. Le pacte germano-soviétique
À l'approche de l'été de 1939, la seule inconnue qui demeure dans les données initiales d'un conflit désormais inéluctable est l'attitude de l'URSS. Sans doute la France et l'Angleterre espèrent-elles encore que l'inconnue de Moscou empêchera Berlin de se lancer dans une guerre générale.
Le 11 août, une mission militaire franco-britannique est dépêchée en URSS pour tenter d'obtenir l'appui de l'Armée rouge contre les nouveaux appétits de l'Allemagne nazie. Aussi est-ce avec stupeur que Paris et Londres apprennent la signature dans la nuit du 23 au 24 août 1939 d'un pacte de non-agression entre l'Allemagne et l'URSS, dont la négociation avait été tenue rigoureusement secrète (→ pacte germano-soviétique).
Les grandes purges qui, de 1936 à 1938, avaient bouleversé le monde soviétique, décimé les cadres de l'État et du parti et décapité l'Armée rouge de son haut commandement avaient sans doute mis l'URSS hors d'état d'intervenir en Europe. En changeant son ministre des Affaires étrangères (Molotov remplace Litvinov), Staline prenait le parti d'éloigner la guerre de son pays au prix d'une aide politique, économique et militaire à l'Allemagne, mais aussi en échange de substantiels profits : l'annexion de la Pologne orientale, des pays Baltes et de la Bessarabie était prévue par une annexe secrète au pacte du 23 août.
2.3. L'invasion de la Pologne
Ayant chassé le spectre de toute menace à l'est, Hitler a désormais les mains libres pour réaliser le Grand Reich. Dès le 29 août 1939, il lance à la Pologne un ultimatum inacceptable et, à l'aube du 1er septembre, la Wehrmacht franchit sans déclaration de guerre la frontière germano-polonaise. Cette fois, Hitler ne peut ignorer qu'il va se heurter à la résistance des alliés occidentaux : le 25 août, la Grande-Bretagne avait garanti publiquement et inconditionnellement les frontières de la Pologne.
Aussi, après l'échec des derniers appels à la paix du pape Pie XII et du président Roosevelt, Hitler refusant de retirer ses troupes de Pologne, la Grande-Bretagne (bientôt suivie par les dominions) et la France déclarent-elles le 3 septembre 1939 la guerre à l'Allemagne.
Arguant de sa faiblesse militaire, l'Italie demeure provisoirement « non belligérante », tandis que les États-Unis proclament leur neutralité armée, confirmée le 3 octobre par la déclaration de neutralité des républiques latino-américaines.
3. Première partie : les victoires de l'Axe (1939-1942)
3.1. Élimination de la Pologne (1er septembre-5 octobre 1939)
Presque aussi timoré que ses homologues alliés, l'état-major allemand s'est vu imposer par Hitler l'audacieuse doctrine de la guerre éclair menée par le couple char-avion, expérimentée de 1936 à 1939 lors de la guerre civile d'Espagne et des invasions de l'Autriche et de la Tchécoslovaquie.
La Pologne disposait aux ordres du maréchal Rydz-Śmigłi d'une vingtaine de divisions et de 10 brigades de cavalerie soutenues par 447 avions et 280 chars anciens.
La Wehrmacht attaque concentriquement, à partir de la Prusse-Orientale, de la Silésie et de la Slovaquie avec 63 divisions, dont 7 Panzer, soit environ 2 000 blindés et près de 2 000 avions.
Surprise en cours de mobilisation, mal déployée, l'armée polonaise, bousculée et rapidement tronçonnée, résiste jusqu'au 27 septembre. Dix jours avant, elle a reçu le coup de grâce : alors que Varsovie venait d'être investie, les forces soviétiques, conformément aux accords du 23 août, franchissaient la frontière orientale polonaise et marchaient à la rencontre de la Wehrmacht.
Conquise en vingt-six jours, la Pologne est, le 28 septembre à Moscou, l'objet d'un quatrième partage. Il fixe la ligne du Bug comme frontière germano-soviétique, en échange de quoi l'URSS obtient de s'installer dans les États baltes, y compris en Lituanie.
Quant à l'Allemagne, elle annexe Memel, Dantzig et son corridor (→ Gdańsk), la Posnanie et la Silésie polonaise. Les régions de Varsovie et de Cracovie, où est concentrée la population, forment un Gouvernement général placé sous administration allemande : le terme même de Pologne a disparu.
Pour en savoir plus, voir l'article campagnes de Pologne.
3.2. « Drôle de guerre » à l'ouest
Sur le front français, les opérations sont très limitées durant l'hiver 1939-1940. Sur mer, elles sont marquées par le torpillage du cuirassé anglais Royal Oak dans la rade de Scapa Flow (14 octobre) et le sabordage du cuirassé allemand Graf von Spee devant Montevideo (17 décembre) ; la Kriegsmarine (marine de guerre) ne dispose alors que de 22 sous-marins de haute mer, et la guerre sous-marine n'en est qu'à ses débuts.
Les gouvernements alliés se sont organisés pour la guerre. À Londres, Churchill prend la tête de l'amirauté, et Eden devient ministre des dominions ; à Paris, Daladier, déjà président du Conseil et ministre de la Défense nationale, s'approprie les Affaires étrangères et dissout les organisations communistes qui, à l'image de Moscou, condamnent la guerre. Il obtient les pleins pouvoirs du Parlement, tandis que le général Gamelin est reconnu généralissime du front occidental.
La stratégie demeure défensive à l'abri de la ligne Maginot et se cantonne dans un blocus dont les Alliés attendent la décision ou au moins le temps nécessaire pour réduire le retard de leurs armements.
Les forces allemandes sont supérieures à celles des Alliés dans tous les domaines, sauf la Marine : 127 divisions terrestres contre un peu plus d'une centaine ; 5 200 avions contre 1 200 pour la France et 1 700 pour la Royal Air Force ; 3 croiseurs et 3 cuirassés contre 3 croiseurs et 10 cuirassés britanniques, et une vingtaine de croiseurs lourds et 3 cuirassés à la France. Le nombre des sous-marins allemands n'est pas supérieur à celui des Français : 120 contre 130.
Une offre de paix de Hitler (6 octobre) est repoussée, comme la médiation du roi Léopold III de Belgique, et de la reine Wilhelmine des Pays-Bas. Au printemps de 1940, un voyage d'information en Europe du secrétaire d'État adjoint américain Sumner Welles, révèle l'impossibilité d'un compromis.
3.3. Campagne de Finlande (30 novembre 1939-12 mars 1940)
Au même moment, les états-majors alliés envisagent, pour parfaire le blocus, des actions aériennes périphériques sur les pétroles roumains comme sur les mines de fer scandinaves. Ces projets prennent corps au moment où l'URSS attaque la Finlande (30 novembre), ce qui lui vaut d'être exclue de la Société des Nations (SDN).
La résistance de l'armée finnoise étonne le monde jusqu'en février 1940, date où les Soviétiques finissent par forcer la ligne Mannerheim, qui barre l'isthme de Carélie. Par le traité de Moscou du 12 mars 1940, l'URSS annexe la Carélie finlandaise et s'empare de la presqu'île de Hanko (Hangö en suédois).
Pour en savoir plus, voir l'article campagnes de Finlande.
3.4. Occupation du Danemark, campagne de Norvège (avril-mai 1940)
Le 16 février 1940, le cargo allemand Altmark est arraisonné dans les eaux norvégiennes par un destroyer anglais, et, le 8 avril, les Alliés annoncent le minage des eaux territoriales de la Norvège pour empêcher le Reich de se ravitailler par Narvik en minerai de fer suédois. Dès le lendemain, Hitler devance ces projets en occupant le Danemark et en envahissant la Norvège.
Les Alliés répondent en débarquant au nord et au sud de Narvik du 13 au 20 avril. La flotte anglaise attaque ce port avec succès, mais la supériorité de la Luftwaffe (armée de l'air) contraint les Alliés à concentrer dans cette seule région leur action terrestre : la prise de Narvik le 28 mai par les Français de Béthouart ne sera qu'un succès éphémère, précédant de peu le rembarquement des troupes alliées imposé par l'offensive allemande sur la France.
Par cette nouvelle victoire, Hitler s'assure aussi bien les portes de la Baltique que la côte norvégienne et contrôle ainsi les débouchés vers l'ouest de l'économie suédoise.
Dès le 9 avril, un gouvernement Quisling, aux ordres des Allemands, a été installé à Oslo, forçant le roi de Norvège Haakon VII à gagner l'Angleterre (juin).
Au Danemark, le roi Christian X décide de demeurer avec son peuple, mais l'Islande, où débarquent les troupes anglaises (10 mai 1940), puis américaines (7 juillet 1941), proclame son désir de dénoncer son union avec le Danemark.
3.5. Guerre éclair aux Pays-Bas, en Belgique et en France

La guerre éclair en Europe et l'avance des troupes de l'Axe vers Stalingrad et le Caucase
Le remplacement de Daladier par Reynaud à la tête du gouvernement français le 22 mars 1940 accentue l'engagement de la France dans la guerre : le 28, elle signe avec l'Angleterre une déclaration où les deux nations s'interdisent de conclure toute paix séparée.
La débâcle
Le 10 mai, la Wehrmacht envahit les Pays-Bas, la Belgique et le Luxembourg. Entre le 10 et le 12 mai, le front français est percé sur la Meuse ; le 14, tandis que l'armée néerlandaise dépose les armes, les Allemands percent de nouveau le front français près de Sedan (→ percée de Sedan) et, par la brèche ainsi ouverte entre Sedan et Namur, les divisions allemandes foncent en direction de l'Oise et de la Somme.
Le 27, remontant vers le nord, les Allemands atteignent Calais et encerclent les forces franco-britanniques, qui sont mises hors de combat ; le 28, tandis que les franco-britanniques évacuent Dunkerque dans des conditions dramatiques, l'armée belge, à son tour, capitule.
L'avance allemande a jeté sur les routes civils et militaires en un exode qui désorganise les communications et rend impossibles les manœuvres de rétablissement du commandement allié.
Cet enchaînement de catastrophes pose au gouvernement français de redoutables problèmes politiques, au moment où, le 10 juin, l'Italie lui déclare la guerre.
Le 11, au Conseil suprême interallié de Briare, le général Weygand (successeur de Gamelin et soutenu par Pétain), que Paul Reynaud a appelé le 18 mai dans son gouvernement, évoque à mots couverts la possibilité d'un armistice, tandis que l'amiral Darlan s'engage, vis-à-vis de Churchill, à ce que la flotte française ne tombe jamais aux mains de l'Allemagne.
Pour en savoir plus, voir l'article campagne de France.
L'armistice
L'avance de la Wehrmacht se poursuit, et Reynaud, qui préconisait la continuation de la lutte en Afrique du Nord, démissionne le 16 juin. Appelé par le président Lebrun, Pétain lui succède comme chef du gouvernement et demande aussitôt l'armistice : il est signé le 22 juin à Rethondes (→ armistice de Rethondes) avec l'Allemagne et le 24 à Rome avec l'Italie.

La défaite française est à l'époque une énorme surprise, d'autant que les forces en présence n’étaient pas disproportionnées. Elle s'explique, entre autres, par l'incapacité du commandement, qui s'est cantonné dans la conception d'une guerre défensive et qui n'a su ni prévoir ni parer une attaque utilisant massivement les forces combinées de l'aviation et des blindés (les Français n'avaient que 3 divisions blindées à opposer aux 12 Panzerdivisionen allemandes).
Les clauses de l'armistice, qui, jusqu'à sa libération en 1944, vont peser sur la France, sont particulièrement sévères.
Son gouvernement perd en effet le contrôle des trois cinquièmes du territoire national – soit toute la région nord-est du pays, Paris, la Bretagne et une bande côtière allant jusqu'à la frontière espagnole – qui seront occupés par l'Allemagne.
Il est convenu que les deux millions de prisonniers le resteront jusqu'à la paix, et que la France paiera l'entretien des troupes d'occupation allemandes. Elle conserve toutefois son Empire colonial, sa marine (à peu près intacte), une armée de 100 000 hommes et une zone non occupée où, le 2 juillet, Pétain installe à Vichy son gouvernement.
→ gouvernement de Vichy.
L'appel du 18 juin 1940
Le jour même où le vieux maréchal demande l'armistice, le 17 juin, le général de Gaulle, membre depuis le 5 juin du gouvernement de Paul Reynaud, rallie Londres et proclame le lendemain son refus de l'armistice et son appel à continuer la lutte aux côtés de l'Angleterre (→ appel du 18 juin).
Tandis qu'ainsi naît la France libre, Pétain reçoit le 10 juillet de l'Assemblée nationale le pouvoir constituant et se proclame chef de l'État. Son autorité s'étend sur l'ensemble de l'Empire sauf l'Afrique-Équatoriale française, les établissements de l'Inde, Tahiti et la Nouvelle-Calédonie, qui, au cours de l'été, se rallient au général de Gaulle.
→ État français.
3.6. L'Angleterre seule
Londres, capitale de la résistance au nazisme
La soudaineté inattendue de l'effondrement français ne pouvait manquer de bouleverser les rapports franco-anglais.
Malgré les assurances réitérées de Darlan, Churchill, dans sa crainte de voir les bâtiments de la marine française utilisés par l'Allemagne, n'hésite pas à attaquer, le 3 juillet, ceux de Mers el-Kébir (où 1 300 marins trouvent la mort) et, le 8 juillet, le cuirassé Richelieu à Dakar, provoquant ainsi la rupture des relations diplomatiques entre Vichy et Londres.
Ce manque de confiance et de sang-froid s'explique par l'isolement subit de la Grande-Bretagne, désormais seule en guerre contre une Allemagne qui apparaît invincible.
Hitler, pourtant, espérait encore amener son adversaire à composition, et, le 19 juillet, il lui fait au Reichstag une ostentatoire offre de paix. C'était compter sans la résolution de Churchill, Premier ministre depuis le 10 mai, et du peuple britannique, qui ont accueilli à Londres – ainsi promue capitale de la résistance au nazisme – les gouvernements tchèque, norvégien, néerlandais, belge et polonais. De Gaulle, qui a échoué dans sa tentative de ralliement de Dakar à la France libre (23 septembre), constitue également à Londres, le 27 octobre, un Conseil de défense de l'Empire français.
La bataille d'Angleterre
C'est alors que commence la fameuse bataille d'Angleterre, dont le succès eût sans doute consacré pour de longues années la victoire allemande.
Occupant toutes les côtes de Narvik (Norvège) à Hendaye, Hitler se trouve dans une position exceptionnelle pour conquérir l'Angleterre. L'offensive aérienne déclenchée le 10 août par la Luftwaffe sur la Grande-Bretagne se heurte toutefois à une telle réaction de la Royal Air Force qu'à la mi-octobre Hitler renonce à l'opération et par là même au débarquement qui devait la suivre.
Pour les Anglais, la menace la plus immédiate se trouve ainsi écartée. Au cours de l'automne, sans renier de Gaulle ni le mouvement de la France libre, Churchill reprend secrètement contact avec Vichy. Les accords Chevalier-Halifax établissent un modus vivendi entre les deux pays : Pétain renonce à reconquérir les territoires français ralliés à de Gaulle et renouvelle ses assurances sur la flotte, mais Churchill s'engage en contrepartie à ne plus rien tenter contre les autres possessions françaises et à ne pas s'opposer aux relations maritimes entre celles-ci et la métropole.
L'effort de guerre britannique

En cette période dramatique, la chance de l'Angleterre est d'avoir à sa tête Winston Churchill, qui incarnera, durant ces six années, la résistance au nazisme. Excentrique, autoritaire, d'un courage indomptable, il est le chef incontesté de la stratégie comme de l'effort de guerre britannique, auquel le Commonwealth est directement associé (les Premiers ministres des dominions font partie du cabinet de guerre britannique).
Dans l'immédiat, c'est de soldats que la Grande-Bretagne a le plus besoin. En dehors de ceux qu'elle a rembarqués à Dunkerque, Churchill ne dispose que de 30 000 à 40 000 hommes en Afrique. Aussi l'apport des dominions, dont les armées sont en 1940 quasi inexistantes, sera-t-il essentiel. Malgré la tiédeur des Canadiens français, le Premier ministre Mackenzie King parviendra à mobiliser au Canada tous les hommes de 21 à 24 ans. L'Australie et la Nouvelle-Zélande fourniront 5 divisions, qui arriveront juste à temps en Égypte à la fin de 1940. L'Afrique du Sud est, elle aussi, en guerre, mais il est entendu que ses troupes ne serviront pas hors d'Afrique. En Inde, les partis nationalistes (→ Congrès et Ligue musulmane) cherchent à monnayer leur appui contre un statut de dominion et donc l'indépendance. Le refus de Churchill, attaché à l'Empire colonial britannique, freinera l'emploi de cet immense réservoir d'hommes. Huit divisions indiennes seront envoyées en Égypte à partir de février 1941, mais l'Angleterre devra laisser des troupes en Inde pour y maintenir l'ordre.
C'est évidemment à la Grande-Bretagne elle-même qu'il revient de fournir le plus gros effort. Plus mal préparée encore que la France (en 1938, 7 % seulement de son revenu sont consacrés au réarmement), elle ne réquisitionne sa flotte marchande qu'en janvier 1940, et, cinq mois plus tard, a encore un million de chômeurs.
Un an après, 40 % de la population active (dont les femmes de 20 à 30 ans) sont mobilisés dans l'armée ou l'industrie. La production monte aussitôt (626 chars par mois en 1941, 717 en 1942), mais plafonne rapidement (2 000 avions par mois contre 2 300 prévus en 1942). Les résultats atteints resteront considérables jusqu'à la fin de la guerre grâce à l'esprit civique des Anglais, à une inflation jugulée au prix d'une baisse du niveau de vie de 14 % par rapport à 1938 et d'un gros effort de justice sociale : le plan Beveridge de 1942 pour l'assurance nationale sera, après 1945, le modèle des systèmes de sécurité sociale.
L'aide américaine

Dès la fin de l'été de 1940, le président Roosevelt, en avance sur l'opinion publique américaine, oriente sa politique vers un appui de la Grande-Bretagne. Passés le 2 septembre de l'état de neutralité à celui de non-belligérance, les États-Unis prêtent 50 destroyers aux Anglais en échange de la location de leurs bases de Terre-Neuve, des Antilles et de Guyane. Le 16 septembre, ils adoptent le service militaire obligatoire. La loi du prêt-bail du 11 mars 1941 ouvre à l'Angleterre un crédit financier illimité.
3.7. La guerre en Afrique et au Moyen-Orient
Après l'élimination militaire de la France, c'est en Libye que se situe le seul front terrestre de la guerre. En septembre 1940, les forces italiennes – 200 000 hommes aux ordres de Graziani – attaquent la petite armée britannique d'Égypte (36 000 hommes commandés par Wavell). Après leur éphémère succès de Sidi-Barrani, les Italiens sont refoulés au-delà de Benghazi par une vigoureuse contre-attaque de Wavell (décembre 1940-février 1941).
C'est alors que Hitler, inquiet de la défaillance italienne, envoie en Libye Rommel et deux divisions blindées (→ Afrikakorps) qui, en avril 1941, reconquièrent la Cyrénaïque et assiègent Tobrouk, dont la garnison restera investie jusqu'au 27 novembre.
Pour en savoir plus, voir l'article campagne de Libye.
Ce succès allemand ne compensera pourtant pas la perte par les Italiens de leur Empire d'Afrique orientale, totalement conquis par les Britanniques : le 10 avril 1941, ceux-ci occupent Addis-Abeba en Éthiopie, où rentrera le négus Hailé Sélassié, tandis que le duc d'Aoste, vice-roi d'Éthiopie, devra capituler le 19 mai à Amba Alagi.
Pour en savoir plus, voir l'article campagnes d'Éthiopie.
Au même moment éclate en Iraq un soulèvement dirigé contre la Grande-Bretagne par Rachid Ali. Pour l'appuyer, le Führer exige de Vichy, au cours de son entrevue avec Darlan le 12 mai 1941, l'usage, pour la Luftwaffe, des aérodromes français du Levant. Mais les Anglais étouffent la révolte et, avec le concours d'un contingent des forces françaises libres du général Catroux, attaquent le 8 juin les troupes françaises de Syrie aux ordres du général Dentz, fidèle au maréchal Pétain. Celles-ci résisteront énergiquement durant un mois, puis cesseront le combat et négocieront avec les Britanniques à Saint-Jean-d'Acre un armistice et leur rapatriement en France (14 juillet 1941).
L'Iran, dont les gisements d'hydrocarbures attisent les convoitises, est devenu depuis le début de l'opération Barbarossa, un carrefour stratégique pour les Alliés qui envoient du matériel à l'Union soviétique par la route reliant le golfe Persique à la mer Caspienne. Britanniques et Soviétiques, inquiets de la présence de milliers de ressortissants allemands dans le pays, exigent du chah Reza Khan de les expulser. Ce dernier, qui ne cache pas ses sympathies pour le Reich, refuse. L'Iran est attaqué dans la nuit du 25 au 26 août 1941 par les armées britanniques et soviétiques, puis occupé par les Alliés qui exploitent le pétrole et les voies de communication. Reza Khan accepte de rompre ses relations avec les pays de l'Axe mais doit abdiquer en faveur de son fils Mohammad Reza (16 septembre).
3.8. L'instauration du nouvel ordre européen
Ayant les mains libres à l'ouest, Hitler peut entamer la construction de la nouvelle Europe destinée à remplacer l'édifice périmé mis en place par le traité de Versailles.
Pour accentuer l'isolement de l'Angleterre, il tente vainement d'entraîner dans la guerre l'Espagne de Franco. Mais le Caudillo, qu'il voit à Hendaye le 23 octobre 1940, fait la sourde oreille.
À son retour, le 24, Hitler rencontre Pétain à Montoire, où est évoquée en présence de Laval la possibilité d'une collaboration entre la France de Vichy et le IIIe Reich. Cette entrevue n'apporte aucun changement au dur régime de l'Occupation et notamment au fardeau que représente pour la France l'indemnité de 400 millions de francs par jour qui permet au Reich d'« acheter l'économie française avec l'argent des Français ».
La Belgique et la Hollande connaissent le régime de l'administration allemande directe ; les vrais « collaborateurs » du type norvégien de Quisling se font rares.
Pour en savoir plus, voir les articles la collaboration, l'Occupation.
La « Nouvelle Europe »
C'est en Europe centrale et orientale que s'ébauche la nouvelle Europe, qui se présente d'abord comme un compromis germano-soviétique. Dans le cadre du pacte du 23 août 1939, l'URSS annexe en août 1940 les pays Baltes, la Bessarabie et la Bucovine roumaines. Il n'y a plus d'État polonais. La Slovaquie « indépendante » de Monseigneur Tiso est dominée par l'Allemagne, qui contrôle directement le protectorat de Bohême et de Moravie. Le 29 août 1940, Hitler rend à Vienne une sentence arbitrale qui achève de dépouiller la Roumanie en donnant à la Bulgarie la Dobroudja méridionale, à la Hongrie les deux tiers de la Transylvanie et en faisant occuper par la Wehrmacht ce qui restait de ce malheureux pays.
Ce nouvel ordre est consacré par la signature à Berlin le 27 septembre 1940 du pacte tripartite – Allemagne, Italie, Japon – dirigé contre la Grande-Bretagne et les États-Unis et auquel les États satellites du Reich sont invités à adhérer, recevant en retour le « bienfait » de la protection et de l'occupation allemandes.
Les différentes formes de l’occupation allemande
Deux principes guident l'administration de l'Europe conquise : elle doit nourrir l'effort de guerre, en fournissant hommes et produits ; elle doit préparer l'avènement d'un nouvel ordre européen. Dans cette « Nouvelle Europe », dominée par l'Allemagne, la position de chaque peuple sera déterminée par sa place sur l'échelle des races établie par la doctrine hitlérienne : les peuples de langue germanique seront associés au Reich, les Latins maintenus dans une position subordonnée, les Slaves déportés ou anéantis, afin de permettre l'expansion allemande vers l'est, de même que les Juifs. Les difficultés de l'arbitrage entre ces deux impératifs expliquent la diversité des formes de l'Occupation nazie.
Quatre types principaux d'administration des territoires soumis se dégagent :
– La Pologne occidentale, l'Alsace, la Moselle, la Slovénie, le Luxembourg sont annexés et germanisés. Une partie des populations non germaniques est expulsée, la mise en valeur des terres devenues vacantes est confiée à des colons allemands. L'administration échoit à des fonctionnaires venus du Reich. La loi du Reich et l'usage de la langue allemande sont imposés.
– Le reste de la Pologne et les territoires pris sur l'URSS sont administrés directement par l'État allemand : soumis à un pillage en règle, ils seront le cadre d'une exploitation sans pitié des populations locales. Les déclarations de Himmler aux chefs SS en 1943 illustrent l'esprit de cette occupation : « Peu m'importe que 10 000 femmes russes meurent pour creuser un fossé antichar si le fossé est creusé. ».
– Le nord de la France, la Norvège, les Pays-Bas, la Belgique sont également placés sous administration allemande, soit pour préparer leur annexion, soit parce que les nazis n'ont pu y recruter de collaborateurs locaux qui les satisfassent. L'exploitation y est cependant moins brutale, même si les opposants et les Juifs sont impitoyablement pourchassés.

– Plusieurs pays, dont la France de Pétain, la Serbie de Nedić, la Slovaquie de Tiso, conservent une administration nationale. Leur situation n'est cependant pas très éloignée de la précédente, à cette différence que l'existence d'un gouvernement propre légitime leur exploitation. Le sort des alliés de l'Allemagne – Hongrie, Roumanie, Bulgarie, voire Italie – se rapprochera de plus en plus de celui de ces pays, au fil des difficultés rencontrées par l'Axe.
3.9. De l'alliance à la guerre germano-soviétique
Le plan Barbarossa
Le pacte germano-soviétique de 1939 fut suivi de l'accord commercial du 11 février 1940, qui, pour Berlin, atténua de façon importante les effets du blocus britannique. Les Allemands obtiennent de payer en 27 mois ce qu'ils reçoivent en 18 : cuivre, nickel, tungstène, céréales, coton et produits pétroliers ; l'URSS accorde une réduction de tarif de 50 % aux marchandises transitant par le Transsibérien.
Tandis que les services de propagande nazis et soviétiques continuaient à converger contre l'impérialisme anglais, de sérieuses divergences se manifestaient lors de la venue en novembre 1940 de Molotov à Berlin. En offrant à Moscou l'Iran et l'Inde, Hitler tente de diriger vers l'Orient la politique soviétique, mais Staline entend affirmer sa position en Europe et exige la révision du régime des détroits turcs des Dardanelles et des détroits danois.

Ces prétentions confirment Hitler dans sa volonté d'abattre l'URSS : il prescrit à son état-major d'accélérer le plan Barbarossa d'attaque contre la Russie, lequel, confié au général Paulus, est adopté le 5 décembre 1940. L'attaque est fixée au printemps suivant, mais la décision en reste secrète, et, jusqu'au dernier jour, des trains soviétiques alimenteront largement l'économie allemande.
Pendant ce temps, la diplomatie de Berlin s'efforce d'isoler l'URSS : des avantages économiques sont concédés à la Finlande, un pacte d'amitié est négocié avec la Turquie (il sera signé le 18 juin 1941), et c'est sans doute pour tenter un compromis avec Londres que Rudolf Hess s'envole pour l'Écosse le 10 mai 1941.
Le préalable des Balkans
Le déclenchement de l'agression contre l'URSS exige que l'Allemagne ait préalablement éliminé toute difficulté pouvant surgir des Balkans. Or, Mussolini, refusant le rôle de parent pauvre de la nouvelle Europe, avait décidé, sans en avertir Hitler, de conquérir la Grèce.
La guerre italo-grecque
Le 28 octobre 1940, les troupes italiennes passent à l'attaque, mais les forces grecques, refoulant leurs agresseurs, occupent bientôt le tiers de l'Albanie ; les Anglais décident alors d'appuyer la Grèce, où ils débarquent des troupes en mars 1941.
Parallèlement, des éléments antiallemands commencent à s'agiter à Belgrade.
L'invasion de la Yougoslavie et de la Grèce par l'Allemagne
Hitler décide alors d'intervenir : huit jours après qu'un coup d'État chassant le régent Paul de Yougoslavie a porté au pouvoir le roi Pierre II, la Wehrmacht envahit brutalement le 6 avril 1941 la Yougoslavie et la Grèce. Dès le 17, les forces yougoslaves doivent capituler, et, le 27 avril, les Allemands entrent à Athènes, chassant de Grèce les unités britanniques ; celles-ci rembarquent au début de mai en direction de l'Égypte, où se réfugie le roi Georges II. Du 20 au 30 mai, les parachutistes allemands du général Student conquièrent la Crète.
L'Éclatement de la Yougoslavie
Ce nouveau succès de la guerre éclair, auquel se sont associées la Bulgarie et la Hongrie, entraîne l'éclatement de la Yougoslavie. La Slovénie est partagée entre l'Allemagne et l'Italie, qui crée une Croatie « indépendante » dont un prince italien est proclamé roi. La Bulgarie reçoit la majeure partie de la Macédoine et de la Thrace, tandis que le Monténégro reconstitué est soumis à l'Italie.
Le retard apporté par ces opérations au déclenchement de l'attaque allemande contre l'URSS sera lourd de conséquences.
Pour en savoir plus, voir l'article Yougoslavie.
3.10. L'invasion de l'Union soviétique
Quelques heures après le franchissement de la frontière soviétique par la Wehrmacht, l'ambassadeur de Staline à Berlin est informé de l'ouverture des hostilités, tandis que Hitler proclame par radio sa « volonté » d'assurer la sécurité de l'Europe… et de « sauver le monde ».
22 juin 1941 : l'entrée en guerre
Appuyées par 2 000 avions et secondées par 50 divisions « alliées » (finlandaises, roumaines, italiennes, hongroises), 145 divisions allemandes, dont 19 blindées (3 300 chars), articulées du nord au sud dans les trois groupes d'armées de Leeb, Bock et Rundstedt, se lancent à l'assaut de l'URSS.
L'Armée rouge compte 140 divisions, dont 24 de cavalerie à cheval et 40 brigades blindées réparties en quatre grands fronts aux ordres de Vorochilov, Timochenko, Boudennyï et Meretskov.
Malgré les avertissements des Américains et des Anglais, et les multiples violations aériennes du territoire russe par la Luftwaffe, il semble bien que Staline se soit laissé surprendre.
Batailles de Smolensk et de Kiev
Tandis que Leeb conquiert les Pays baltes et marche sur Leningrad, investie le 8 septembre, Bock gagne la grande bataille pour Smolensk (8 juillet-5 août). Mais, contre l'avis de son état-major, qui voulait centrer tout son effort sur l'axe Smolensk-Moscou, Hitler envoie Rundstedt conquérir l'Ukraine. Ses troupes sont à la fin d'août sur la ligne Jitomir-Ouman-Odessa et livrent avec les groupements blindés Kleist et Guderian une nouvelle bataille d'encerclement du 13 au 26 septembre autour de Kiev.
Vers Moscou

Ce n'est qu'au début d'octobre, après la prise de Viazma et d'Orel, que les chars allemands de Guderian sont rameutés sur Toula et Moscou. Le 1er novembre, les avant-gardes allemandes atteignent Mojaïsk, à 90 km de Moscou. Le 5 décembre, elles sont à 22 km au nord de la capitale, dont Hitler et le monde entier attendent la chute avant Noël.
Contre-offensive soviétique de l'hiver 1941-1942

Mais, le 6 décembre, une brutale contre-offensive soviétique dirigée par Joukov dégage Toula, reconquiert Kline et Kalinine, sauve Moscou et bloque définitivement la Wehrmacht, à bout de souffle et incapable de tenir tête aux rigueurs d'un hiver où le thermomètre descend jusqu'à −50 °C.
Ce premier et retentissant échec de la guerre éclair entraîne dans la Wehrmacht une grave crise. Le Führer chasse plusieurs chefs de l'armée (Brauchitsch, Rundstedt et Guderian) et assume désormais directement le commandement des forces terrestres.
Soutien des Alliés à l'Union soviétique et ébauche des futures Nations unies

Alors que Hitler se lançait dans une aventure qui scellera sa perte, Staline bénéficiait aussitôt de l'assistance des alliés occidentaux.
Le 10 juillet 1941, Churchill s'engage à ne conclure avec l'Allemagne aucun armistice ni paix séparée. Roosevelt décide en septembre de faire bénéficier l'URSS de la loi du prêt-bail : elle recevra de 1942 à 1945 du matériel de guerre américain dont la valeur s'élèvera à 11 milliards de dollars.
En juillet 1941, les troupes américaines relèvent les Britanniques en Islande, et, le 14 août, Churchill et Roosevelt se rencontrent en mer ; ils proclament la charte de l'Atlantique, affirmant leur unité de vues sur les principes qui doivent guider le rétablissement d'une paix fondée sur le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. Ces principes seront réaffirmés le 1er janvier 1942 par la déclaration des Nations unies signée à Washington par les États-Unis, la Grande-Bretagne, l'URSS et vingt-trois pays en guerre avec l'Axe.
Pour en savoir plus, voir l'article Organisation des Nations unies.
3.11. Japon et États-Unis : la rupture et l'entrée en guerre

Si les États-Unis s'engagent ainsi sur le théâtre occidental, leur vigilance est attirée plus encore en Extrême-Orient par l'attitude du Japon.
Pressions et tensions
En 1940, pour interdire les fournitures d'armes à Tchang Kaï-chek, Tokyo, profitant de la défaite française, avait imposé en juin la fermeture du chemin de fer du Yunnan et obtenu de l'Angleterre en juillet celle de la nouvelle route de Birmanie.
Au moment de la signature du pacte tripartite avec l'Allemagne et l'Italie (septembre), le prince Konoe annonce un « ordre nouveau » en Extrême-Orient, qui, pour lui, comprend la Mandchourie, la Chine, l'Inde, le Sud-Est asiatique (y compris l'Australie) et le Pacifique.
La pression du Japon s'accroît sur l'Indochine française, qui doit accepter la présence de ses troupes, d'abord au Tonkin (juillet 1940), puis, après l'arbitrage imposé par Tokyo au conflit franco-thaïlandais, en Cochinchine (juillet 1941).
À cette attitude, Roosevelt répond d'abord par des mesures économiques, mettant l'embargo sur les expéditions américaines à destination du Japon (notamment le pétrole), puis bloque le 26 juillet 1941 les avoirs japonais aux États-Unis.
Cependant, le Japon hésite encore à se lancer dans la guerre : au mois de mars, le ministre Matsuoka entreprend un voyage en Europe, où, après s'être arrêté à Rome et à Berlin, il signe, le 13 avril, à Moscou, un pacte d'amitié avec l'URSS.
Mais, après l'échec de nouvelles négociations nippo-américaines (Hull-Nomura), le cabinet Konoe démissionne le 16 octobre 1941 et est remplacé par celui du général Tojo Hideki, qui personnifie le parti militaire, résolu à s'assurer par la force les richesses (pétrole, étain, caoutchouc) du Sud-Est asiatique.

Le 7 décembre 1941, la flotte combinée japonaise de l'amiral Yamamoto surprend et détruit en deux heures l'escadre américaine de Pearl Harbor (Hawaii). Le 8, les États-Unis déclarent la guerre au Japon, lequel déclare la guerre à la Grande-Bretagne et à ses dominions ; le 11, Berlin et Rome sont en guerre avec les États-Unis : le conflit est alors devenu mondial, à la seule et essentielle réserve près de la neutralité maintenue jusqu'en 1945 entre l'URSS et le Japon.
La guerre éclair japonaise (décembre 1941-juin 1942)

Son principal adversaire étant provisoirement maîtrisé, l'état-major nippon, qui, seul, détient le pouvoir à Tokyo, lance aussitôt ses forces à l'attaque.
Le 10 décembre 1941, elles torpillent deux grands bâtiments de la flotte britannique d'Extrême-Orient, le Prince of Wales et le Repulse ; à Noël, elles ont occupé la Thaïlande, Hongkong, débarqué aux Philippines, conquis Guam.
La vague déferle ensuite sur Bornéo, la Malaisie, les Célèbes, la Nouvelle-Bretagne et la Nouvelle-Guinée ; Singapour capitule le 15 février 1942. En mars, l'Indonésie et la Birmanie sont complètement conquises, puis c'est le tour des Philippines avec les capitulations de Bataan (9 avril) et de Corregidor (7 mai). Au début de l'été, une ultime avance pousse les Japonais aux îles Aléoutiennes (juin), dans les îles Salomon (Guadalcanal, 4 juillet) et en Nouvelle-Guinée (juillet-août).
Leurs avions, qui ont bombardé l'Australie (février) et Ceylan (5 avril), attaquent maintenant l'Alaska et l'île canadienne de Vancouver (20 juin).
Ainsi, le rêve des impérialistes nippons semble réalisé : en huit mois, Tokyo s'est rendu maître de la moitié du Pacifique et contrôle plus de 90 % de la production mondiale du caoutchouc, 75 % de celle de l'étain et une immense réserve de pétrole.
Contre-offensive américaine
Dès le printemps de 1942, toutefois, la réaction des États-Unis se fait sentir, infligeant à la marée japonaise ses premiers coups d'arrêt par les deux victoires de la flotte américaine du Pacifique, commandée par l'amiral Nimitz dans la mer de Corail (4-8 mai) et aux îles Midway (4-5 juin).
Mais c'est aux Salomon que l'état-major américain a décidé de constituer la base de sa contre-offensive : celle-ci débutera le 7 août par un débarquement de vive force à Guadalcanal, qui amorce le retournement de la situation stratégique en Extrême-Orient.
Pour en savoir plus, voir l'article campagnes du Pacifique.
4. La guerre à mi-course
À la fin de 1942, au moment où l'Allemagne, l'Italie et le Japon ont atteint le zénith de leur puissance expansive, leurs forces subissent en Russie, en Afrique et dans le Pacifique des coups d'arrêt que l'avenir révélera décisifs.
4.1. Ultimes poussées de l'Axe en URSS et en Afrique
La bataille de Stalingrad (novembre 1942-février 1943)
La victoire de l'armée soviétique devant Moscou est suivie dans les deux camps par une période de relative accalmie, mise à profit par l'URSS pour réorganiser ses armées et transférer de nombreuses usines de guerre en direction de l'Oural, en Sibérie et au Turkestan.

Le 5 avril 1942, Hitler fixe à la Wehrmacht les objectifs de sa prochaine offensive, qui visera la Volga, le Caucase et son pétrole. Retardée par une action de l'Armée rouge au sud de Kharkov (mai), elle débouche le 28 juin en direction de Voronej, pivot à la boucle du Donets, tandis que capitule Sébastopol après un siège de 250 jours.
Le front russe est percé sur 500 km, et, après la chute de Rostov (23 juillet), les Allemands se lancent vers le Caucase, entrent à Maïkop, plantent le drapeau à croix gammée au sommet de l'Elbrous (21 août) ; ils sont bloqués dans la région du Terek à 120 km de la Caspienne, mais à 600 km de Bakou.
Au même moment, la VIe armée (→ Paulus) franchit le Don à Kalatch, atteint la Volga (20 août) et conquiert du 1er au 15 septembre une grande partie de la ville de Stalingrad.
Alors que Hitler croit tenir la victoire, débouche le 19 novembre la contre-offensive soviétique qui, encerclant l'armée de Paulus, la contraint à capituler le 2 février 1943.
Cette première grande défaite allemande a un énorme retentissement : toute une armée a été détruite après avoir perdu 250 000 hommes à cause de l'entêtement du Führer, ce qui a pour effet de dresser contre lui nombre de chefs militaires. L'Armée rouge a pris l'initiative des opérations ; elle ne l'abandonnera plus jusqu'à Berlin.
Pour en savoir plus, voir l'article bataille de Stalingrad.
La campagne de Libye
En Libye, l'année 1942 marque également la dernière avance africaine des forces de l'Axe. Après son offensive de janvier, qui l'avait porté à proximité de Tobrouk (10 février), Rommel déclenche le 27 mai une nouvelle attaque. Elle est d'abord retardée par la résistance de Bir Hakeim, tenu du 27 mai au 11 juin par les Français libres du général Kœnig qui permet aux Britanniques de se replier vers l'Égypte.
Mais, après avoir pris Tobrouk le 21 juin, l'Afrikakorps de Rommel franchit la frontière égyptienne et contraint la VIIIe armée britannique à se replier au début de juillet sur la position d'El-Alamein, à 130 km d'Alexandrie, qui marque le point extrême de l'avance allemande en direction du canal de Suez.
Après avoir vainement tenté de rompre le front adverse, Rommel est surpris le 23 octobre par une brutale contre-offensive de Montgomery (nommé en août à la tête de la VIIIe armée), et doit à son tour rompre le combat le 2 novembre. Six jours plus tard, les Américains débarquent au Maroc. Six mois après, la Wehrmacht sera chassée d'Afrique.
Pour en savoir plus, voir l'article campagne de Libye.
Le développement de la guerre sous-marine
D'autre part, la guerre sous-marine a pris un développement considérable. Dans l'Atlantique, l'année a été désastreuse pour les Alliés : 3 millions de tonnes de navires coulés de janvier à juillet, 700 000 en novembre. Mais là aussi la situation tend à se renverser : en octobre 1942, les pertes des sous-marins allemands atteignent en nombre celui des submersibles construits, et, grâce à l'effort prodigieux des chantiers américains, le tonnage allié construit dépassera, au début de 1943, celui qui est coulé par les sous-marins de l'Axe.
Dans le Pacifique, les sous-marins américains détruisent en 1942 un million de tonnes de navires nippons, chiffre à peine inférieur à celui des prises de guerre et constructions neuves du Japon.
4.2. L'effort de guerre allemand
Dans l'ensemble, l'Allemagne réussira à financer par ses propres ressources la moitié de son imposant effort de guerre. L'autre moitié sera fournie par les territoires occupés et singulièrement (40 %) par la France.
Anarchique jusqu'à la mort de Fritz Todt (février 1942), la production allemande d'armement, placée sous la haute autorité de Göring, directeur du plan, est pour l'ensemble des années 1941 et 1942 nettement inférieure à celle de la Grande-Bretagne pour les avions (24 000 contre 31 000) et à peine supérieure pour les chars (14 500 contre 13 400).
Le successeur de Todt, Albert Speer, sait planifier cette production sans trop diminuer jusqu'à la fin de 1943 la consommation allemande. Un effort considérable est accompli dans la fabrication de carburants et huiles synthétiques (3,8 millions de tonnes en 1943), mais, dès 1942, c'est le problème de la main-d'œuvre, confié au Gauleiter Fritz Sauckel, qui devient primordial.
Le problème de la main-d'œuvre
En 1943, 11 millions d'hommes servent dans la Wehrmacht, dont les pertes (tués, blessés, disparus et prisonniers) sont alors de 4 millions. Pour y remédier, les Allemands enrôlent à titre d'auxiliaires (dits « Hilfswillige ») de nombreux Soviétiques, si bien que, compte tenu de leurs « alliés », les effectifs sur le front est comprennent 25 % d'étrangers. La main-d'œuvre civile comprend 30 millions de personnes, dont 8 dans l'industrie. En 1944, Sauckel aura ramené dans le Reich, au titre du Service du travail obligatoire (STO), 6,3 millions d'ouvriers étrangers (dont 723 000 Français). Leur travail s'ajoute à celui de plus de 2 millions de prisonniers de guerre et aussi à celui des déportés des camps de concentration.
Une étonnante efficacité jusqu'à la fin
Aussi Speer réussit-il à faire passer la fabrication des chars de 9 400 en 1942 à 19 800 en 1943 et à 27 300 en 1944, et celle des avions de 13 700 en 1942 à 22 000 en 1943 et à 36 000 en 1944. Ces résultats sont obtenus alors que les bombardements aériens de la Royal Air Force et de l'US Air Force atteignent des proportions écrasantes : 48 000 tonnes de bombes en 1942, 207 000 t en 1943, 915 000 t en 1944.

Cet effort de guerre se poursuivra jusqu'à la fin avec une étonnante efficacité : 7 200 avions sont encore construits dans les quatre premiers mois de 1945, ce qui porte la production totale allemande de 1939 à 1945 à environ 100 000 avions, chiffre un peu supérieur à la production anglaise (88 000 avions). Il permettra notamment l'engagement, à la fin de 1944, de nouvelles armes, tels les avions à réaction « Me 262 » (produits à 1 200 exemplaires) et les fusées de type V1 et V2, mises au point au centre de recherche de Peenemünde sous la direction de Wernher von Braun.
4.3. L'effort de guerre soviétique
La direction de la guerre en Union soviétique est confiée à un organisme nouveau, le Comité d'État pour la défense, présidé par Staline, qui étend son autorité sur tous les organismes de l'État et du parti. Il dirige la production et l'économie, mais aussi les forces armées, avec le concours de la Stavka (l'état-major), que commande de 1937 à novembre 1942 un militaire de grande classe, le maréchal Chapochnikov, auquel succédera le maréchal Vassilevski.
L'intelligence de Staline le conduit à mettre l'accent sur le patriotisme et les traditions militaires russes (restauration des ordres de Souvorov, d'Alexandre Nevski) ; les insignes de grades des officiers réapparaissent, l'Internationale cesse d'être l'hymne national, et le Komintern est supprimé (15 mai 1943).
Contrecoups de l'invasion allemande
Du fait de l'invasion allemande, la production industrielle globale baisse en septembre 1941 de plus de 50 %. La situation s'aggrave encore en 1942, où la production du charbon baisse de 142 à 75 millions de tonnes, celle de la fonte de 18 à 5, celle de l'acier de 13,8 à 4,8… Mais, au même moment, les Soviétiques évacuent 1 300 entreprises de grandes dimensions, ainsi que 10 millions de personnes (dont 2 de la région de Moscou), qui vont s'installer dans l'Oural, en Sibérie occidentale et en Asie centrale, où de nouvelles usines sortent de terre.
À la fin de 1942, la situation est redressée : la production de matériel de guerre dépasse celle de 1941, et les livraisons anglo-américaines, qui ont débuté dès octobre 1941, arrivent alors par Arkhangelsk, par l'Iran et par Vladivostok (elles comprennent notamment 22 000 avions, 12 184 chars, 2,6 millions de tonnes d'essence, 4,5 millions de tonnes de vivres).

 
 
 
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