Édition du génome : des possibilités inouïes qui posent des questions éthiques
Édition du génome : des possibilités inouïes qui posent des questions éthiques
SCIENCE 19.06.2018
Bioéthique - L’édition génomique
génomique
Étude conduite à l’échelle du génome, portant sur le fonctionnement de l’organisme, d’un organe, d’une pathologie...
consiste à modifier le génome d’une cellule, qu’elle soit d’origine végétale, animale, ou humaine. Elle existe depuis une quarantaine d’années mais l’avènement de la technique CRISPR-Cas l’a rendue accessible à la plupart des laboratoires. Certains travaux soulèvent des questions éthiques pour la santé des individus, la préservation de la biodiversité et de l’environnement ou encore pour le bien-être animal. Le point avec Hervé Chneiweiss, président du comité d’éthique de l’Inserm.
Pouvez-vous expliquer en quelques mots comment fonctionne l’édition génomique ?
Les chercheurs utilisent un guide couplé à des nucléases
nucléases
Enzyme capable de couper des acides nucléiques au niveau des liaisons phosphodiesters.
capables de reconnaître spécifiquement une séquence sur le génome et de couper à cet endroit. Ensuite des processus naturels de réparation se déclenchent et commettent des erreurs, ce qui permet d’inactiver le gène ciblé. Il est également possible de fournir à la cellule, en même temps que la nucléase, la copie d’un gène pour qu’il soit intégré au moment de la réparation et remplace le gène initial. Les possibilités sont multiples : les chercheurs peuvent créer des mutations précises dans des gènes pour en observer les effets ou à l’inverse corriger des mutations, ils peuvent inactiver des gènes, insérer de nouveaux fragments d’ADN, modifier l’expression des gènes, etc.
L’édition génomique connaît un regain d’intérêt depuis l’avènement de CRISPR-Cas, pourquoi ?
Les nucléases de type doigts de zinc et Talen – disponibles avant 2012 et encore utilisées aujourd’hui – sont complexes à développer. Il s’agit de protéines issues de bactéries et leur fonction première n’est pas d’aller modifier sur mesure l’ADN d’une espèce. Pour les rendre spécifiques d’une séquence cible et faire en sorte qu’elles ne coupent qu’à cet endroit, il y a un travail de développement et de production de protéines long et fastidieux avant de pouvoir les utiliser. De plus, leur taille les rend très difficiles à faire entrer dans une cellule. La mise au point peut durer plusieurs mois. Elle est réservée à des laboratoires spécialisés.
CRISPR-Cas9 a bouleversé la façon de faire. Cette fois ce n’est plus une protéine qui reconnaît la séquence cible mais un ARN
ARN
Molécule issue de la transcription d'un gène.
, lui-même couplé à une protéine Cas (Cas9 le plus souvent, mais il existe d’autres protéines Cas). Celle-ci coupera l’ADN dans un second temps, là où l’ARN s’est fixé. Il suffit donc de produire un ARN dont la séquence est complémentaire de celle de la séquence cible, ce qui se fait extrêmement facilement et à moindre coût. À peu près n’importe quel laboratoire de biologie peut utiliser cette technique et a désormais accès à l’édition génomique.
Inserm
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Quelles recherches sont menées aujourd’hui avec l’édition génomique ?
Il s’agit surtout de recherche fondamentale. L’édition génomique permet d’obtenir facilement des modèles cellulaires et animaux porteurs de mutations particulières ou chez lesquels un gène a été inactivé, par exemple pour étudier le développement ou des processus physiopathologiques. Il y a aussi des analyses à grande échelle d’invalidation de gènes ou encore des essais précliniques, conduits chez l’animal dans un but thérapeutique, afin de corriger une mutation ou de rendre un organisme résistant à une maladie.
Quelques essais cliniques sont même en cours chez l’Homme : en infectiologie pour lutter contre le VIH en conférant aux cellules de l’organisme une résistance au virus, en cancérologie pour rendre les cellules T agressives contre la tumeur, ou encore contre la mucopolysaccharidose, une maladie lysosomale, pour forcer l’expression d’une enzyme déficiente. Il s’agit chaque fois de cellules modifiées ex vivo puis réinjectées au patient. Modifier l’ADN d’une cellule in vivo est bien plus complexe. Ceci a déjà été réalisé chez une souris pour corriger une forme génétique de surdité, mais plusieurs années seront encore nécessaires avant les premières applications chez l’Homme.
Existe-il une réglementation particulière pour l’utilisation de l’édition génomique ?
Aucune en dehors des procédures habituelles qui s’appliquent à toute manipulation génétique dans les laboratoires de recherche, y compris les restrictions concernant l’embryon humain. La France est signataire de la convention d’Oviedo, qui interdit de pratiquer des modifications génétiques transmissibles à la descendance. Il est donc possible d’utiliser l’édition génomique chez l’embryon humain dans des conditions de recherche, puisqu’à leur issue l’embryon doit être détruit, mais pas dans un contexte de procréation médicalement assistée. Cette convention internationale est la seule loi internationale en vigueur dans le domaine de la bioéthique.
Que pensez-vous des travaux d’édition génomique qui ont déjà eu lieu chez l’embryon humain en Chine et aux États-Unis ?
La première expérience a eu lieu en Chine, en 2015. Elle visait à corriger une mutation conférant la bêta-thalassémie, une maladie sanguine. Plus récemment, en 2017, une équipe américaine a tenté de corriger une mutation associée à une pathologie cardiaque grave. Il ne s’agit en aucun cas de travaux cliniques et ces embryons ne sont pas destinés à être implantés chez une femme. Il s’agit de recherche fondamentale pour évaluer l’efficacité et la sécurité de CRISPR-Cas sur des embryons qui sont ensuite détruits. Les résultats sont d’ailleurs médiocres. Le pourcentage d’embryons effectivement modifiés est relativement faible et le risque de mosaïcisme – c’est-à-dire le risque que les cellules d’un même embryon ne possèdent plus toutes le même patrimoine génétique – est élevé.
Pour de nombreux organismes scientifiques et comités éthiques, dont celui de l’Inserm, il est actuellement inenvisageable de recourir à ce type d’intervention chez un embryon qui serait destiné à faire naître un enfant faute de garanties d’efficacité et de sécurité suffisantes, même si la convention d’Oviedo était modifiée.
Cela soulève néanmoins d’importantes questions éthiques. Que se passera-t-il si l’édition génomique devient sûre et efficace chez l’embryon ? Sera-t-il possible de modifier le génome selon le désir des parents ?
À terme, dans l’hypothèse où la technique CRISPR-Cas deviendrait efficace et fiable chez l’embryon, elle pourrait être utilisée dans des indications rares et très précises : par exemple pour éviter la transmission d’une maladie grave quand les deux parents en sont atteints et que le risque de donner naissance à un enfant malade est de 100%. Il s’agira alors de corriger la mutation chez l’embryon ou même en amont, au niveau des cellules germinales
cellules germinales
À l'origine de la formation des gamètes, leurs gènes sont transmis à la descendance.
avant la fécondation. L’Académie de médecine s’est prononcée en faveur de cette possibilité.
Quant au risque d’eugénisme, cela relève à mon avis du fantasme. D’abord parce que cette recherche est très encadrée, y compris en Chine et aux États-Unis. Et puis, on oublie trop souvent que l’eugénisme se pratique déjà, par exemple avec l’élimination de petites filles à la naissance dans certains pays. Il n’a pas fallu attendre l’édition génomique pour cela. Mais il est en effet nécessaire d’encadrer l’utilisation qui pourrait en être faite.
Quelles autres questions éthiques soulève l’édition génomique ?
L’une des principales préoccupations est la maîtrise de cette technique, condition sine qua non pour une utilisation chez l’Homme. Or plusieurs freins restent à lever, comme le risque de coupures hors cible qui peuvent générer des mutations ailleurs dans le génome, avec des conséquences délétères. Il y a également le fait qu’il existe une hétérogénéité génétique entre plusieurs cellules soumises à une même édition génomique : la technique fait en effet appel à des mécanismes qui réparent l’ADN de façon aléatoire. Autre question à laquelle nous ne savons pas encore répondre : comment réagissent les cellules modifiées à long terme, y a-t-il des effets indésirables ? D’autres préoccupations portent sur le devenir d’organismes modifiés, autres qu’humains, et les conséquences pour ces espèces et pour l’environnement.
Il existe en effet une polémique sur la modification génétique de populations de moustiques visant à réduire le risque de maladies à transmission vectorielle. Pouvez-vous préciser de quoi il s’agit ?
Une technique appelée guidage de gènes reposant sur l’utilisation de CRISPR-Cas permet de forcer la transmission d’un gène modifié dans une espèce, au cours des générations. Elle est proposée pour rendre une population de moustiques stérile ou lui conférer une résistance à l’agent pathogène. La faisabilité a été démontrée au laboratoire. En champ réel, une expérimentation a déjà été menée au Panama avec des moustiques transgéniques produits par une autre méthode. Elle a permis de réduire la quantité de moustique Aedes aegypti porteurs du virus de la dengue, avec une diminution de 93% du taux de contamination dans la région concernée.
Ces pratiques soulèvent beaucoup de questions : quel est le risque de "contamination" d’espèces autres que la population cible ? Quel est l’impact écologique – et pour la biodiversité – de l’éradication de moustiques qui sont des insectes pollinisateurs et nourrissent les larves de poissons ? Quels sont les risques à long terme pour l’espèce en cas d’acquisition de nouvelles "propriétés" ? Comment arrêter la propagation du gène en cas de perte de contrôle de la technologie ? Des études doivent être conduites sur des périodes longues, avec l’élaboration de scénarios multiples par des équipes pluridisciplinaires associant biologie moléculaire, écologie, sciences sociales, pour une évaluation prudente de la balance bénéfice/risque à long terme.
En outre, il n’y a pas que les moustiques. Des travaux similaires portent sur des espèces végétales envahissantes, afin de contrôler leur dispersion ou d’éliminer leur résistance aux herbicides ou pesticides. Enfin, d’autres questions se posent avec la modification génétique d’espèces à des fins commerciales. Ainsi, en Argentine et en Uruguay, des fermes expérimentales modifient le génome de moutons et de veaux pour augmenter la taille de leurs muscles dans le but de produire deux fois plus de viande. Quelles sont les conséquences pour la qualité de vie animale et pour les consommateurs ?
Il y a deux ans, la CIA déclarait CRISPR-Cas "arme de destruction massive potentielle", compte tenu de sa facilité d’utilisation. Peut-on imaginer des menaces particulières par exemple à visée terroriste ?
Je crois que c’est exagéré. Produire des organismes génétiquement modifiés qui seraient particulièrement virulents serait très dangereux pour les chercheurs eux-mêmes et nécessiterait des compétences et des équipements très pointus. Cela me paraît peu probable.
Une recherche responsable
Pour créer une gouvernance globale concernant l’édition génomique, le comité d’éthique de l’Inserm a créé ARRIGE (Association for Responsible Research and Innovation in Genome Editing) en 2018. Cette association internationale entend fournir aux chercheurs publics et privés, aux associations de patients, aux citoyens et aux politiques les données pour développer l’édition génomique dans un contexte sécurisé et serein sur le plan sociétal.
Pour aller plus loin
* Dossiers d’information Edition génomique et Thérapie génique
* Note du comité d’éthique sur la saisine concernant les questions liées au développement de la technologie CRISPR-Cas9 (février 2016)
* CRISPR-Cas9 : comment modifier les génomes va changer la société – article de Solveig Fenet, François Hirsch et Hervé Chneiweiss, paru dans The Conversation (octobre 2016)
Sous titre
Un ensemble de maladies complexe, encore mal compris
Une diversité de symptômes et d’évolution : Il n’y a pas une mais des épilepsies. Ensemble, elles constituent la troisième maladie neurologique la plus fréquente, derrière la migraine et les démences. Aux yeux du grand public, l’épilepsie est associée à des crises avec convulsions, absences, rigidité musculaire… Mais chaque syndrome épileptique peut se manifester par une grande variété de symptômes et être accompagné de troubles de l’humeur, de la cognition, du sommeil... Chacun est en outre associée à une évolution qui lui est propre.
Les enjeux de la recherche : La complexité de ces maladies motive une forte dynamique de recherche, aussi bien expérimentale que clinique. Afin d’améliorer les options de traitement, qui restent insatisfaisantes pour près d’un tiers des malades, il est indispensable de trouver de nouvelles approches fondées sur la compréhension fine et exhaustive des mécanismes à l’origine de la maladie, puis de chaque crise.
* TEMPS DE LECTURE 20 min DERNIÈRE MISE À JOUR 01.03.18 DIFFICULTÉ 4 sur 5
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Dossier réalisé en collaboration avec Stéphanie Baulac, unité 1127 Inserm/CNRS/UPMC, équipe Génétique et physiopathologie des épilepsies familiales, Institut du Cerveau et de la Moelle Epinière, Paris, Antoine Depaulis et Philippe Kahane, unité 1216 Inserm/Université Grenoble Alpes, équipe Synchronisation et modulation des réseaux nerveux dans l'épilepsie, Grenoble Institut des neurosciences (GIN).
Comprendre l’épilepsie
Bien qu’elle soit reconnue depuis l’Antiquité, l’épilepsie revêt encore beaucoup de mystères. Toutefois, sa compréhension ne cesse d’évoluer. Si dans l’imaginaire collectif elle se limite souvent à des crises épisodiques, elle constitue en réalité une maladie du cerveau englobant différents symptômes, dont les plus spectaculaires sont effectivement ces fameuses crises. Ainsi, les troubles cognitifs ou psychiatriques que l’on considérait auparavant comme des comorbidités
comorbidités
Maladie associée à une pathologie principale.
font désormais partie intégrante de la maladie épileptique. Dans ce contexte, la crise ne constituerait que la partie émergée de l’iceberg, avec parallèlement des conséquences neurobiologiques, cognitives, psychologiques et sociales.
Aujourd’hui, on estime qu’il existe environ une cinquantaine de maladies épileptiques (ou syndromes épileptiques) qui sont définies en fonction de leur âge d’apparition, de leur cause sous-jacente (présumée ou avérée) et de la présentation clinique des crises qui y sont les plus fréquemment associées. Quelques-unes ont une composante génétique certaine, mais la plupart sont d’origine multifactorielle, liées à des composantes héréditaires, lésionnelles et/ou environnementales.
In fine, on ne parle donc plus de l’épilepsie mais des épilepsies, un ensemble de maladies dont les manifestations et l’origine sont très variées. Elles ont cependant toutes un point commun : une excitation synchronisée et anormale d’un groupe de neurones plus ou moins étendu du cortex cérébral, qui peut secondairement se propager à - ou faire dysfonctionner - d’autres zones du cerveau. Il en résulte une activité électrique - de survenue brutale, intense et prolongée - qui engendre les symptômes de la crise (mouvements involontaires, hallucinations auditives ou visuelles, absences…). L’expression de ces symptômes dépend :
* de la/des zones cérébrales dans lesquelles sont situées les neurones impliqués
* du rôle de ces cellules nerveuses dans les systèmes qui gèrent notre motricité, notre cognition, nos émotions ou nos comportements.
Ainsi les épilepsies sont des maladies qui affectent des circuits nerveux plus ou moins étendus, pouvant conduire à la modification de leur fonctionnement physiologique.
Des maladies fréquentes qui affectent l’espérance de vie
On estime que 600 000 personnes souffrent d’épilepsie en France. Près de la moitié d’entre eux sont âgés de moins de 20 ans. À l’échelle internationale, l’incidence de la maladie serait de 50 à 100 cas pour 100 000 habitants (selon le niveau de revenu et le système de soin du pays), soit 60 millions de malades.
Globalement, la durée de vie moyenne d’un patient épileptique est légèrement inférieure à celle de la population générale, principalement du fait du risque de décès accidentel au décours d’une crise (noyade, chute, accident). Quant aux morts subites inattendues (Sudden Unexpected Death in Epilepsy), spécifiques de certaines formes d’épilepsie, elles restent rares (30 000 par an dans le monde, 115 en 5 ans en France).
Selon la nature de la maladie épileptique, le pronostic est variable : certaines sont des maladies chroniques qui perdurent tout au long de la vie, certaines sont limitées à la période néonatale ou à l’enfance, d’autres n’apparaissent qu’au cours de la vie adulte, tandis que d’autres encore sont amenées à disparaître à l’âge adulte, une fois la maturation cérébrale accomplie. Enfin, dans certains cas, lorsque la cause initiale de l’épilepsie peut être traitée, la maladie peut être guérie.
De la crise aux manifestations associées
La manifestation la plus typique de l’épilepsie est la crise épileptique, dont on distingue deux types : la crise généralisée et la crise focale. Mais les troubles associés de la cognition, du sommeil ou du langage... font aussi partie du syndrome épileptique. Toutes ces manifestations ont des conséquences délétères sur le bien-être, l’insertion scolaire et socioprofessionnelle, la vie quotidienne et la qualité de vie des personnes malades.
Les crises généralisées
Elles sont liées à l’excitation et la synchronisation de neurones issus d’emblée de plusieurs zones réparties dans les deux hémisphères cérébraux. Elles associent une perte de conscience transitoire (absence de quelques secondes à quelques minutes) à des signes moteurs toniques (contractions musculaires), myocloniques (secousses musculaires), tonicocloniques (associant les deux) ou atoniques (sans tonus musculaire).
Les crises que l’on a longtemps appelées grand mal ou petit mal constituent les formes les plus connues de crises généralisées. La première, la plus impressionnante, correspond à une crise motrice touchant l’ensemble de la musculature squelettique (raidissement brutal puis secousses), associée à une perte de conscience et à des manifestations végétatives (respiratoires, urinaires...). La seconde, désormais appelée "absence", se caractérise par une rupture brutale de la conscience, parfois accompagnée de légères contractions musculaires des membres ou des paupières, ou encore d’une chute du tonus musculaire.
Les crises focales (ou partielles)
Selon la région cérébrale impliquée, elles engendrent différentes manifestations cliniques : une décharge au niveau du cortex moteur peut par exemple engendrer un raidissement ou des secousses des doigts, selon les neurones incriminés, et peut (ou non) se propager au bras puis au reste du corps. De la même façon, la crise épileptique peut engendrer des fourmillements dans un membre, des hallucinations auditives ou des hallucinations visuelles selon que la décharge électrique touche une région corticale sensitive, auditive ou visuelle...
Pour résumer, les symptômes d’une crise épileptique focale sont innombrables et aussi variés que des troubles du langage, des manifestations de déjà-vu ou déjà-vécu, des signes émotionnels (peur, rire, extase...), des douleurs, des signes végétatifs (salivation, apnée, tachycardie
tachycardie
Rythme cardiaque trop rapide.
...) des gestes automatiques ou des comportements moteurs étranges et souvent explosifs. Une perte de conscience (ou du contact avec l’extérieur) est aussi souvent observée.
L’hyperexcitation de la crise focale peut se propager et, ainsi, engendrer une crise secondairement généralisée.
Les autres manifestations de l’épilepsie
Troubles cognitifs (troubles de la mémoire, du langage, de l’attention…), troubles de l’humeur (dont la dépression) ou troubles du comportement… : les autres manifestations de l’épilepsie sont nombreuses. Lorsqu’elles surviennent durant l’enfance et l’adolescence, période de maturation cérébrale, les crises à répétition peuvent engendrer des troubles neuropsychologiques et neurodéveloppementaux parfois sévères.
Par ailleurs, les crises en tant que telles, par leurs conséquences directes, peuvent entraîner des complications : chutes et risque associé de fractures, de traumatismes voire de décès.
L’épilepsie chez l’enfant
La maladie revêt un certain nombre de spécificités chez l’enfant, qu’elles soient épidémiologiques, étiologiques, cliniques ou thérapeutiques. L'âge auquel débute la maladie détermine souvent le type du syndrome épileptique, dont la gravité varie en fonction de divers facteurs (état de maturation cérébrale, agression cérébrale sous-jacente, prédisposition génétique...).
Ainsi, le syndrome de West (spasmes et troubles du développement psychomoteur) ou le syndrome de Dravet (épilepsie myoclonique sévère) qui apparaissent dès les premiers mois du nourrisson, ou le syndrome de Lennox-Gastaut (absences et crises toniques), qui survient durant les toutes premières années, sont des formes rares mais assez sévères, pouvant être associées à une composante génétique et/ou anatomique (anomalie cérébrale).
A l’inverse, l’épilepsie-absence est une des formes les plus fréquentes de la maladie chez les enfants, dont l’évolution est plus bénigne et qui disparaît souvent à l’adolescence ou chez l’adulte jeune. Elle survient souvent entre 5 et 7 ans, plus particulièrement chez les filles. Cette maladie, qui présente sans doute une composante génétique, est aussi favorisée par les lumières intermittentes ou l’hyperventilation. Elle se manifeste par des absences de quelques dizaines de secondes, dont l’enfant n’a pas mémoire, et s’accompagne de modifications motrices très discrètes (myoclonies, automatismes, diminution du tonus musculaire). Ces crises peuvent se répéter de nombreuses fois au cours d’une même journée.
Enfin, on estime que 2 à 5% des enfants souffrent un jour d’une crise ou de convulsions liée à un épisode fébrile au cours de leurs premières années de vie. Pour la grande majorité d’entre eux, cet épisode n’aura pas d’incidence ultérieure. Cependant, pour quelques-uns, ces premières crises peuvent constituer les prémices d’une épilepsie à venir, en particulier d’une épilepsie mésio-temporale, la forme la plus fréquente d’épilepsie focale de l’adulte.
Une origine polyfactorielle
Des facteurs comme une anomalie métabolique (hypoglycémie, hypocalcémie…), la prise d’un médicament épileptogène (neuroleptiques
neuroleptiques
Médicaments utilisés pour combattre les troubles mentaux.
, certains antidépresseurs, certains antalgiques…) ou l’exposition à un toxique épileptogène (monoxyde de carbone, gaz neurotoxiques …) peuvent expliquer la survenue d’une crise épileptique unique et ponctuelle.
Mais lorsqu’une telle cause accidentelle n’est pas impliquée, il n’est pas toujours facile d’identifier l’origine des épilepsies : la plupart du temps, leur origine est considérée comme polyfactorielle, liée à :
* des facteurs génétiques
* des facteurs environnementaux
* des maladies métaboliques
* des lésions du cerveau (traumatiques, vasculaires, tumorales, malformatives, inflammatoires ou infectieuses)
On parle d’épilepsie cryptogénique lorsque aucune cause évidente n’a pu être identifiée.
L'existence d’une composante génétique dans deux tiers des épilepsies est désormais reconnue, bien qu’elle reste incomplètement élucidée. Certaines formes de la maladie sont clairement associées à la transmission de mutations affectant un gène unique (maladie monogénique) ou à l’apparition d’une mutation de novo, mais la plupart sont probablement d’origine polygénique. Et si certaines mutations ne favorisent que des crises isolées, d’autres inscrivent l’épilepsie dans un tableau clinique plus complexe, associant un retard psychomoteur ou un déficience intellectuelle. Actuellement, plus d’une centaine de gènes impliqués ont déjà été identifiés, et la plupart d’entre eux font l’objet d’une recherche diagnostique en routine.
L’épigénétique joue probablement aussi un rôle dans l’étiologie de la maladie, mais les études qui lui sont dédiées restent encore rares.
A l’échelle du neurone
La crise épileptique correspond à la survenue transitoire de signes et/ou de symptômes dus à une activité neuronale cérébrale intense (hyperexcitabilité) et anormalement synchrone dans les réseaux neuronaux impliqués. L’image la plus parlante serait celle d’un court-circuit troublant le fonctionnement cognitif et/ou le comportement normal du sujet.
La transmission d’information d’un neurone à l’autre se fait habituellement par le cheminement du message nerveux le long de l’axone du premier d’entre eux, via l’activation de différents canaux ioniques. A l’extrémité de l’axone, au niveau de la synapse
synapse
Zone de communication entre deux neurones.
, des échanges d’ions et la libération de neurotransmetteurs
neurotransmetteurs
Petite molécule qui assure la transmission des messages d'un neurone à l'autre, au niveau des synapses.
permettent d’activer différents récepteurs et canaux ioniques localisés sur le second neurone. Une modification de l’activité électrique est alors générée sur ce dernier, conduisant ainsi à la transmission du message nerveux.
L’épilepsie résulterait en partie d’anomalies concernant l’activation des canaux ioniques ou celle des neurotransmetteurs. Ainsi, lors d’une crise, le taux de GABA
GABA
Principal neurotransmetteur inhibiteur.
(un neurotransmetteur inhibiteur) au niveau synaptique est inférieur au taux habituel, tandis que celui du glutamate
glutamate
Neurotransmetteur excitateur le plus répandu dans le système nerveux central.
(excitateur) est anormalement élevé. Pendant longtemps, on a considéré que l’épilepsie était le fruit du déséquilibre entre ces deux neurotransmetteurs. Aujourd’hui, cette seule hypothèse ne suffit plus : d’autres voies cellulaires sont incriminées dans la genèse des crises. C’est notamment le cas dans certaines épilepsies d’origine génétique, pour lesquelles la mutation de gènes codant pour des protéines présentes à la surface des neurones et impliquées dans la transmission nerveuse, a été identifié.
Par ailleurs, l’embrasement électrique (ou kindling) associé aux crises favoriserait la pérennisation de l’épilepsie grâce à l’activation de certains récepteurs à l’acide glutamique (récepteurs NMDA), capables de se réactiver ultérieurement plus facilement, mais également grâce à d’autres modifications structurelles et fonctionnelles qui caractérisent la plasticité neuronale.
Ainsi, réduire les épilepsies à un dysfonctionnement d’un neurotransmetteur ou d’un canal ionique est sans doute simpliste : c’est en général un réseau complexe qui est modifié par la maladie.
L’électroencéphalogramme : examen incontournable
La suspicion clinique d’une épilepsie repose sur la survenue d'au moins deux crises non provoquées par un facteur déclenchant et espacées de plus de 24 heures. Une seule crise suffisamment typique et associée à une forte probabilité de récurrence peut parfois suffire à poser l’hypothèse. Plusieurs examens complémentaires permettent ensuite d’écarter d’autres pathologies pouvant provoquer des crises, de poser le diagnostic d’épilepsie, de localiser la région épileptogène et/ou rechercher et localiser une lésion responsable de l’épilepsie :
* L’examen clinique et un bilan biologique permettent d’écarter la plupart des crises épisodiques liées à un facteur précipitant aigu. Un second bilan biologique, défini selon le bilan clinique et les données de l’EEG et de l’imagerie (cf ci-dessous) permet de rechercher, par exemple, un désordre métabolique, auto-immun ou génétique.
* L’électroencéphalogramme (EEG) est incontournable, tant pour le diagnostic que pour le suivi la maladie. Il consiste à enregistrer l’activité électrique cérébrale grâce à des électrodes posées sur le scalp durant une vingtaine de minutes. L’aspect, la fréquence et la topographie des anomalies enregistrées en dehors des crises (pointes ou pointes-ondes) aident à caractériser le syndrome épileptique et/ou à localiser la zone cérébrale impliquée. L'EEG standard peut cependant s'avérer normal en dehors des crises. Dans ce cas, il est complété par un enregistrement sur une période plus longue (plusieurs heures) ou après exposition à un facteur favorisant (privation de sommeil…). En cas de doutes sur la nature épileptique des crises, sur le type de crises ou sur leur localisation, des enregistrements d’une semaine à 15 jours sont utilisés. Dans ce cas, un monitorage vidéo est associé à l’EEG afin de corréler les manifestations cliniques et les modifications correspondantes de l’EEG.
* La tomodensitométrie cérébrale (TDM), ou – mieux - l’imagerie par résonance magnétique (IRM), sont les principales méthodes de neuroimagerie utilisées pour éliminer une cause tumorale ou hémorragique, ou pour rechercher une lésion cérébrale épileptogène.
Des traitements essentiellement médicamenteux
Les traitements des épilepsies sont médicamenteux dans la grande majorité des cas. Leur but est de réverser les altérations de la transmission synaptique excitatrice ou inhibitrice et de limiter la propagation des crises. Grâce à ces traitements, la maladie peut être contrôlée (absence de crises) dans 60 à 70% des cas.
Ils agissent à différents niveaux : blocage des canaux synaptiques sodium, potassium ou calcium, inhibition de certains acides aminés excitateurs, stimulation d’autres molécules ayant un effet inhibiteur comme le GABA. Parmi les plus fréquemment utilisés, le phénobarbital, le valproate de sodium, la carbamazépine, l'oxcarbazépine, la lamotrigine, le lacosamide, le topiramate, le zonisamide… Toutes ces molécules ont un profil d’efficacité qui diffère selon le type de syndrome épileptique. Le choix est donc établi selon le diagnostic syndromique, mais aussi en fonction de l'âge, du sexe, de l'existence d'éventuelles comorbidités associées, tout en tenant compte du profil de tolérance de la molécule.
En cas de pharmacorésistance, la chirurgie peut être envisagée à condition que la zone responsable des crises (zone épileptogène), soit focale, unique et suffisamment à distance de régions hautement fonctionnelles (impliquées dans le langage, la motricité, etc..). Dans ce cas, des examens approfondis sont conduits pour évaluer le rapport bénéfice/risque d’une telle opération. Lorsqu’elle est dite curative, l'intervention consiste à enlever (chirurgie de résection) ou à détruire (gamma-knife, ablation laser, thermocoagulation) la zone épileptogène. En pratique, ceci n’est envisageable que chez une minorité de patients souffrant d’épilepsie partielle pharmacorésistante.
Pour les autres, des approches dites palliatives, faisant notamment appel à des méthodes de neurostimulation, sont développées depuis une trentaine d’années. L’objective est alors de diminuer la fréquence des crises. Schématiquement, ces approches consistent à agir directement sur le réseau neuronal responsable des crises, ou à en moduler l'excitabilité à distance. Plusieurs techniques sont aujourd’hui proposées : non invasives (stimulation magnétique transcrânnienne, stimulation transcutanée du nerf trijumeau), semi-invasives (stimulation du nerf vague
nerf vague
Nerf reliant le cerveau à divers organes pour assurer la régulation des fonctions autonomes de l'organisme, comme la digestion, la respiration ou la fonction cardiaque.
) ou invasives (stimulation du noyau antérieur du thalamus, stimulation corticale en boucle fermée). Leur utilisation varie en fonction de la problématique soulevée par chaque patient.
Les enjeux de la recherche
Continuer à décrypter ...
...l’origine génétique de la maladie
Facilitées par l’avènement du séquençage haut débit, les avancées dans ce domaine sont particulièrement importantes depuis une quinzaine d’années. Identifier l’origine génétique d’une épilepsie permet de stopper les recherches d’une étiologie non génétique, d’identifier les mécanismes moléculaires et cellulaires impliqués dans les manifestations cliniques et dans la maladie, de développer des modèles animaux pour tester de futurs traitements et de proposer un conseil génétique, voire un dépistage génétique prénatal aux parents qui ont déjà eu un enfant souffrant d’une forme sévère.
Ces cinq dernières années, le séquençage de l’exome de parents et de leurs enfants malades a permis d’identifier de nombreuses mutations dites de novo, impliquées dans des formes sévères d’épilepsie, telles que les encéphalopathies épileptiques. La plupart de ces mutations touchent des gènes codant pour des sous-unités de canaux ioniques ou de récepteurs aux neurotransmetteurs (gène SCN1A, HCN1, KCNQ2…)
Un gène impliqué dans différentes formes d’épilepsie focale
Beaucoup d’épilepsies focales (frontale, temporale, à foyer variable…) sont secondaires à une lésion cérébrale ou à une malformation du développement cortical. Mais il semble de plus en plus évident que certaines sont également liées à des facteurs génétiques parfois uniques (monogéniques). Si des mutations familiales ont pu être identifiées, l’équipe Génétique et physiopathologie des épilepsies familiales de l’Institut du Cerveau et de la Moelle (ICM – unité Inserm 1127) a montré que certaines sont somatiques, c’est-à-dire acquises au cours du développement, uniquement par les cellules composant le tissu cérébral. En étudiant les différentes formes d’épilepsies focales, l’équipe a identifié des mutations touchant le gène DEPDC5 qui est impliqué dans la voie de signalisation cellulaire
signalisation cellulaire
Ensemble de mécanismes de communication qui régissent le fonctionnement et l’activité des cellules.
mTOR. Cette découverte ouvre potentiellement la voie vers de nouvelles approches thérapeutiques : la voie mTOR constitue en effet déjà la cible de plusieurs médicaments développés en cancérologie, comme l’évérolimus et ses dérivés.
Pour en savoir plus sur ces travaux
...la naissance et la récurrence des crises
Si elle constitue un phénomène cérébral normal face à certaines agressions, ou pour assurer l’apprentissage au cours du sommeil, la synchronisation des neurones est anormalement efficace et prolongée dans l’épilepsie : aussi, la recherche se consacre activement à élucider les mécanismes de l’épileptogenèse, qui aboutit à la formation d’un réseau neuronal propice à la manifestation d’une crise initiale puis à ses récidives. Un autre pan de la recherche vise à décrypter les fondements de l’ictogenèse, le mécanisme déclenchant la crise.
Les données actuelles permettent de penser que l’installation du terrain épileptique est progressive et favorisée par la plasticité cérébrale
plasticité cérébrale
Mécanismes au cours desquels le cerveau est capable de se modifier en réorganisant les connexions et les réseaux neuronaux, dans la phase embryonnaire du développement ou lors d’apprentissage.
importante au cours du développement. Une fois structuré, ce réseau neuronal dysfonctionnel déclencherait les premières crises visibles et resterait ensuite relativement stable dans le temps.
Un modèle animal de l’épilepsie-absence
Les modèles animaux sont indispensables pour avancer dans la compréhension des épilepsies : ils peuvent mimer des épilepsies d’origine lésionnelle, ou des épilepsies pour lesquelles les modifications morphologiques ou fonctionnelles sont idiopathiques
idiopathiques
Qui existe par soi-même, indépendamment d’une autre maladie.
ou d’origine génétique.
A l’Institut des neurosciences de Grenoble (GIN – unité Inserm 1216), l’équipe Synchronisation et modulation des réseaux neuronaux épileptiques, a développé un modèle animal permettant d’étudier les mécanismes neurobiologiques de l’épilepsie-absence (anciennement petit mal). Il s’agit de la plus fréquente des épilepsies de l’enfant, qui se caractérise par des absences très stéréotypées de plusieurs secondes, associées à des pointes-ondes typiques lors d’un enregistrement l’EEG. La lignée des rats GAERS (Genetic Absence Epilepsie Rats from Strasbourg) a été développée en sélectionnant des lignées de rats naturellement épileptiques, qui présentent le même type d’anomalies comportementales et EEG que l’homme.
Ces travaux ont permis de suggérer que l’épileptogenèse reposerait sur un mécanisme progressif, s’établissant à bas bruit durant plusieurs années avant la crise inaugurale et le diagnostic proprement dit. En effet, des anomalies EEG cliniquement non visibles sont mises en évidence précocement chez le raton GAERS dès 15 jours après la naissance. Elles évoluent et se structurent au cours des semaines suivantes pour aboutir aux premiers symptômes typiques vers l’âge de 30 jours.
On pense également désormais que la maladie ne repose pas uniquement sur le dysfonctionnement des neurones : les cellules gliales, qui les entourent et participent à leur maturation, alimentation et synchronisation, pourraient jouer un rôle. Les astrocytes
astrocytes
Cellule gliale en forme d’étoile qui assure le support et la protection des neurones.
semblent en particulier dysfonctionner dans certains modèles animaux. Une inflammation locale pourrait notamment en modifier le fonctionnement.
Dans le cerveau en développement
Habituellement, au cours du développement, les neurones réorganisent les connexions qu’ils créent entre eux pour n’en privilégier que quelques-unes. Des chercheurs de l’Institut de neurobiologie de la Méditerranée (Inmed, unité Inserm 1249, équipe Bases moléculaires et physiopathologie des malformations du cortex cérébral) ont observé que ce tri n’est pas réalisé chez les patients épileptiques. En conséquence, ces derniers garderaient des réseaux de communication très développés, propices à la synchronisation des neurones. Plus récemment, dans un modèle animal d’épilepsies infantiles sévères transmissibles, ils ont décrit un retard de migration et de maturation des cellules neuronales au cours du développement cérébral in utero, lié à la présence d’une mutation du gène TBC1D24.
… le lien entre crises et symptômes associés
Il semble aujourd’hui établi qu’une relation bidirectionnelle existe entre l’épilepsie et les troubles associés aux crises (cognition, humeur, sommeil…), suggérant l’existence de mécanismes neurobiologiques communs. Des anomalies structurelles, fonctionnelles et neuropathologiques similaires ont ainsi été identifiées chez les sujets souffrant d’épilepsie et ceux souffrant d’autres troubles. Il pourrait aussi exister une composante génétique, certaines familles présentant par exemple des antécédents de dépression et d’épilepsie plus fréquents que la population générale. Enfin, il est probable que, conjointement à ces mécanismes communs, des bouleversements neuronaux secondaires aux crises initient ou amplifient les troubles associés.
Une mutation associée à plusieurs troubles
En cherchant à comprendre les liens entre certaines épilepsies pédiatriques, les encéphalopathies épileptiques, et les troubles cognitifs et comportementaux qui leur sont associées (déficience intellectuelle, trouble du langage…), des chercheurs de l’Inmed (équipe Epilepsies et encéphalopathies néonatales, du nourrisson et de l’enfance) ont identifié une mutation commune : elle affecte le gène, GRIN2A qui code pour les récepteurs NMDA régissant la communication interneuronale.
Epilepsie et dépression
Des chercheurs de l’Institut de Neurosciences neurosciences des Systèmes systèmes (INS, unité Inserm 1106, Marseille) ont développé un modèle animal d’épilepsie du lobe temporal
lobe temporal
Région latérale inférieure du cerveau qui se trouve au niveau des tempes.
, une forme de la maladie qui associé à une dépression dans 30% des cas chez l’humain. Dans ce modèle, les animaux qui présentaient un faible taux de BDNF (un facteur de croissance
facteur de croissance
Molécule qui favorise ou inhibe la multiplication des cellules.
du cerveau) avant la première crise étaient ensuite plus vulnérables face à la dépression. Rétablir le taux de BDNF initial, pharmacologiquement ou en limitant la survenue d’antécédents de stress intense, permettrait d’éviter le développement de ce trouble de l’humeur.
Trouver de nouveaux traitements
Si 60 à 70% des patients répondent favorablement aux médicaments, la recherche thérapeutique est encore nécessaire. En effet, la mise à disposition de molécules plus efficaces ou présentant moins d’effets secondaires (fatigabilité, somnolence, tremblement, troubles cognitifs ou de l’humeur, prise ou perte de poids…) permettrait d’améliorer le contrôle de la maladie et la qualité de vie des malades. Par ailleurs, les malades répondant peu ou pas aux traitements médicamenteux ont besoin de solutions alternatives.
Ainsi, de nombreux essais cliniques sont aujourd’hui conduits soit avec de molécules déjà utilisées dans d’autres maladies neurologiques (évérolimus, fenfluramine, nalutozan...), soit avec de nouvelles molécules ciblant les mécanismes d’action des antiépileptiques actuels (selurampanel, CPP115, cenobamate, ganaxolone...). Mais l’important effort de compréhension des mécanismes neurobiologiques de la maladie a aussi permis l’émergence d’une nouvelle génération de traitements expérimentaux visant à interagir avec des cibles thérapeutiques inédites (huperzine A, cannabidiol, tonabersat, 2-deoxyglucose, pitolisant...).
De nouvelles approches galéniques, permettant de délivrer les médicaments au site même du foyer épileptogène (nanoparticules, nanotechnologies), améliorant ainsi la balance bénéfice-risque des médicaments antiépileptiques, sont également en développement.
Un cerveau virtuel pour décrypter l’épilepsie
Des chercheurs de l’Institut de neurosciences des systèmes (INS, Marseille) ont participé au développement d’un modèle in silico de cerveau virtuel, permettant de reconstituer le cerveau d’une personne atteinte d’épilepsie.
Ce modèle de base peut être implémenté par les informations propres au patient, pour mimer les spécificités de ses crises (initiation, propagation). Cet outil, capable de reconstruire en imagerie 3D dynamique les régions du cerveau, leurs connexions et l’activité électrique, génère des crises similaires aux crises réelles du patient. Il pourrait aider à évaluer de nouvelles stratégies thérapeutiques.
En savoir plus
D’autres approches, moins conventionnelles, pourraient en outre bouleverser l’offre thérapeutique dans l’épilepsie à moyen terme, comme la thérapie génique, l’optogénétique (qui consiste à intégrer des protéines naturellement sensibles à la lumière dans les neurones pour en contrôler l’activité), l’implantation de capteurs permettant de prédire la survenue des crises, ou le développement d’antagonistes (baptisés antagomirs) de certains microARN, ces petits ARN
ARN
Molécule issue de la transcription d'un gène.
non codants circulants dont le rôle a été décrit dans l’épilepsie...
Le traitement chirurgical, aujourd’hui proposé lorsque la région épileptogène est localisée dans une partie du cerveau accessible et opérable sans risque majeur, est aujourd’hui complété par de nombreuses approches de stimulation électrique cérébrale ou périphérique : aux sites d’implantation actuellement confirmés pourraient s’ajouter certaines approches ciblant notamment le cervelet ou l’hippocampe.
Des rayons X contre les crises
L’équipe Synchronisation et modulation des réseaux neuronaux épileptiques (GIN, Grenoble) s’intéresse également à l’utilisation de rayons X générés par synchrotron
synchrotron
Grand instrument électromagnétique destiné à l’accélération à haute énergie de particules élémentaires.
dans le traitement des épilepsies : l’équipement européen ultra-puissant basé à Grenoble est capable de délivrer des microfaisceaux de quelques dizaines de microns qui restent bien tolérés par le tissu nerveux. Ainsi, l’irradiation sous plusieurs angles de la région corticale génératrice de crises chez le rat GAERS (modèle génétique d'épilepsie-absence) a permis de supprimer les crises pendant plusieurs mois.
PLAN
* VACCINATION
* L’histoire de la vaccination
* Observations empiriques
* Edward Jenner et la vaccine
* Le principe de la vaccination
* La nature du vaccin
* L'efficacité individuelle des vaccins
* L’efficacité collective des vaccins
* Les étapes de la vaccinatio * Inoculation du vaccin
* Primovaccination
* Rappels
* Les vaccinations courantes
* Chez l'enfant
* Chez l'adulte
* Le calendrier des vaccinations
* Contre-indications et effets indésirables
vaccination
Cet article fait partie du dossier consacré à l'immunité.
Administration d'un vaccin ayant pour effet de conférer une immunité active, spécifique d'une maladie, rendant l'organisme réfractaire à cette maladie.
L’histoire de la vaccination
Observations empiriques
Au cours des grandes épidémies qui dans le passé déciment l'Europe, on constate que les personnes contaminées qui ont survécu peuvent s'occuper des autres personnes atteintes sans retomber malades : elles sont devenues, définitivement, résistantes à la maladie en question – et à celle-là seulement.
Ces observations empiriques conduisent, bien avant que l'on ne découvre les mécanismes de l'immunité, à induire une maladie pour s'en protéger. La pratique de la variolisation, arrivée en Europe au début du xviiie siècle, aurait vu le jour en Chine au début du xie siècle. Apportée de Constantinople (où elle est pratiquée par des femmes grecques et circassiennes) en Angleterre par lady Mary Wortley Montagu, elle devient très en vogue sous le règne de Louis XV dans les classes privilégiées ; elle consiste à inoculer une variole bénigne (par scarification avec du pus varioleux) pour éviter une forme plus grave… mais elle fait beaucoup de dégâts.
Edward Jenner et la vaccine
La première méthode efficace de lutte contre la variole est la vaccination mise au point en 1796 par le médecin anglais Edward Jenner, sur la base de l’observation suivante : la maladie ne touchait pas les préposés à la traite des vaches qui avait préalablement contracté la vaccine, ou cow-pox (la variole de la vache), maladie bénigne transmise par les pustules des pis des femelles atteintes.
Le succès de la vaccination – effectuée de bras à bras avant que Louis Pasteur n’invente la culture de bactéries atténuées – est tel que le mot a été conservé pour désigner plus largement la pratique qui consiste à prévenir une maladie en injectant une petite dose de la bactérie ou du virus tués ou atténués qui lui est associé, ou de fragments de ces microorganismes, ou encore d’anatoxine (toxine bactérienne inactivée).
Le principe de la vaccination
La découverte des mécanismes de l'immunité a permis d'élucider le principe de la vaccination. En effet, outre la phagocytose (immunité naturelle ou innée) réalisée par des globules blancs spécialisés (les polynucléaires et les macrophages), l'organisme peut lutter contre une maladie infectieuse grâce à deux voies : l'une dite cellulaire (intervention des lymphocytes T), l'autre dite humorale (fabrication d'anticorps par les lymphocytes B).
Le système immunitaire est sollicité pour éliminer tout ce qu'il ne reconnaît pas comme faisant partie de l'organisme (le soi) : c’est-à-dire tous les éléments étrangers (le non-soi), notamment les virus et les bactéries. Ces intrus font partie des antigènes capables de déclencher une réponse immunitaire incluant la fabrication d'anticorps. Le système est caractérisé par sa mémoire hautement spécifique et durable : lorsqu'il se retrouve en présence d'un antigène déjà vaincu, la réponse immunitaire est immédiate et efficace. Cette mémoire, assurée par des cellules mémoire (lymphocytes T et B) qui restent dans l’organisme après la fin de l’infection, est d’une durée variable selon les agents infectieux ; elle se prolonge parfois toute la vie (cas de la varicelle par exemple).
La vaccination, qui repose sur ces propriétés, consiste à mettre l'organisme en contact avec une fraction bactérienne ou virale de la maladie combattue (ou un virus atténué, ou une toxine inactivée), afin que le système immunitaire l'élimine et en garde le souvenir. Un contact ultérieur avec la même maladie entraîne une réaction rapide et intense contre les antigènes reconnus. On parle d'immunité active, par opposition à la sérothérapie, dite passive, qui consiste à fournir les anticorps et non à stimuler le système immunitaire de l'organisme.
Étant donné que l'immunisation active n'apparaît que plusieurs jours ou plusieurs semaines après l'administration du vaccin, la vaccination représente le plus souvent un moyen de prévention contre une infection donnée. Mais elle peut être aussi utilisée pour renforcer les défenses de l'organisme contre une infection déjà installée (vaccinothérapie). La sérovaccination associe la vaccination (protection à long terme) et la sérothérapie (action immédiate) ; ainsi prévient-on le tétanos chez les personnes non vaccinées susceptibles d'avoir contracté la maladie à l'occasion d'une blessure, même minime (piqûre de rosier, par exemple).
La nature du vaccin
Plusieurs types de préparations sont utilisées :
• des germes tués ou inactivés : contre le virus de la grippe ;
• des germes vivants atténués : BCG contre la tuberculose ; vaccins anti-rougeole, rubéole, oreillons ; vaccin anti-rotavirus ; vaccin anti-amarile (fièvre jaune) ;
• des anatoxines sécrétées par le germe et inactivées : contre les toxines de la diphtérie, du tétanos ;
• des fragments ou antigènes, qui n’ont aucun pouvoir infectieux, extraits des germes (capsule de méningocoque ou de pneumocoque, polyoside de Hæmophilus influenza B (ou HiB), des germes de la typhoïde ou de l'hépatite B.
Cette dernière technique de fabrication, qui n’utilise qu’un fragment sans danger du microbe, est de plus en plus utilisée pour sa bonne tolérance.
Certains vaccins sont injectés seuls (BCG, fièvre jaune, grippe, méningocoque) mais la plupart des vaccins de l’enfant sont utilisés sous forme combinée de vaccin :
• trivalent : rougeole-oreillons-rubéole (ROR) ;
• tétravalent : diphtérie, tétanos, poliomyélite et coqueluche (DTCP) ;
• pentavalent : DTCP + hæmophilus HiB ;
• hexavalent : / DTCP + hépatite B + hæmophilus HiB.
Pour en savoir plus, voir l'article vaccin.
L'efficacité individuelle des vaccins
Elle dépend de plusieurs facteurs : la nature de l'antigène et la dose administrée, l'utilisation ou non d'un adjuvant, le mode d'administration et l'âge du sujet, mais aussi la constitution génétique de ce dernier, son état nutritionnel et son immunocompétence.
À sa naissance et pendant sa première année de vie, l'enfant possède des anticorps de type IgG (immunoglobulines gamma) qui correspondent sensiblement à ceux de la mère, lesquels, au cours des derniers mois de la vie intra-utérine, ont traversé la barrière placentaire. Si le bébé est allaité, des anticorps lui sont encore transmis par le lait maternel ; ils jouent un rôle protecteur important contre certaines infections.
Certains vaccins, comme le combiné rougeole-oreillons-rubéole (ROR), peuvent être inefficaces lorsqu'ils sont pratiqués avant l'âge de 1 an. Néanmoins, l'enfant est capable de s'immuniser très tôt, et la plupart des vaccins sont généralement administrés au cours de la première année.
L’efficacité des vaccins va de 60 % pour la typhoïde à 98 % pour le tétanos ou la diphtérie. Celle du vaccin contre la grippe varie selon les années et les variations génétiques des virus grippaux. L’élaboration d’un vaccin anti-grippal universel est à l’étude.
L’OMS, à travers son Plan d’action mondial pour les vaccins, a fixé un objectif de 90 % d’enfants vaccinés (on parle de « couverture vaccinale ») contre la diphtérie, le tétanos et la coqueluche avec un minimum de 80 % quelle que soit la région; ainsi que des objectifs d’introduction élargie de vaccins nouveaux ou sous-utilisés dans certains pays (tels que le vaccin antipneumococcique), et d’éradication de la poliomyélite et du tétanos maternel et néonatal, voire de la rougeole. Ce plan est soutenu financièrement par le budget des États et par le GAVI, l’Alliance Globale pour les Vaccins et l’Immunisation, partenariat lancé en 2000 entre des fonds publics et privés (États, Banque Mondiale, UNICEF, OMS, fondations philanthropiques privées).
L’efficacité collective des vaccins
La vaccination généralisée permet, lorsque le seul ou le principal réservoir de bactéries ou de virus est l’homme, de casser les chaînes de contamination, d’empêcher la circulation du microorganisme et de réduire le risque y compris pour les personnes non vaccinées (immunité de groupe). C’est ainsi que l’on est parvenu à éradiquer la variole en 1977 et que l’on espère éradiquer la poliomyélite dans les prochaines années. L’éradication de la rougeole est envisageable si la couverture vaccinale atteint 95 % dans le monde.
Tout refus individuel, de fondement philosophique ou religieux par exemple, retarde cette éradication dont le bénéfice est collectif.
Par ailleurs, l’immunité de groupe protège les individus qui ne peuvent bénéficier de certains vaccins (nouveaux-nés, immunodéprimés) ou chez qui l’efficacité est amoindrie (sujets âgés). Se vacciner est donc aussi un acte altruiste qui protège les plus vulnérables que soi. C’est ce qui justifie l’obligation vaccinale quand la proportion de population vaccinée diminue au-dessous du seuil de couverture vaccinale nécessaire au maintien de cette immunité collective.
→ santé publique.
Les étapes de la vaccination
Inoculation du vaccin
Selon le vaccin, l'inoculation peut être faite par voie sous-cutanée, intramusculaire, intradermique (→ injection) ou par voie orale (rotavirus). Depuis 2012, le vaccin en spray nasal contre la grippe est autorisé chez l'enfant en France. Ce vaccin s'avère plus efficace que le vaccin classique chez l'enfant, mais pas chez l'adulte. On a recours aujourd'hui à deux types de vaccination :
• les vaccinations combinées, qui consistent à mélanger, au moment de la fabrication, les vaccins dans la même seringue et à les inoculer en un seul point de l'organisme ;
• les vaccinations simultanées, qui consistent à administrer les vaccins en différents points de l'organisme ou par des voies différentes.
Primovaccination
Lorsqu'un organisme est vacciné pour la première fois (primovaccination), il ne réagit pas aussitôt : il connaît une période de latence qui varie entre 24 heures et 15 jours, selon la composition du vaccin et le système immunitaire du sujet. Ensuite commence la production d'anticorps (elle dure de 4 à 28 jours) ; c'est la période de croissance. Enfin, les anticorps sont progressivement éliminés de l'organisme (période de décroissance).
Rappels
Le rappel vaccinal correspond à la réintroduction de l'antigène après un certain délai, c'est-à-dire quand tous les anticorps fabriqués après la première injection ont été éliminés. Effectué trop tôt, le rappel peut être inopérant, car l'antigène réintroduit est détruit par les anticorps non encore éliminés et non par ceux nouvellement produits. La réponse secondaire de l'organisme est caractérisée par une courte période de latence et une intense période de croissance : les anticorps prolifèrent rapidement. Les cellules T et B mémoire sont stimulés immédiatement ; les cellules B se différencient en cellules sécrétrices d'anticorps spécifiques de l'antigène introduit.
Si des modifications antigéniques apparaissent au cours du temps dans la structure des virus, la vaccination doit être renouvelée chaque année avec un nouveau vaccin (vaccination annuelle contre le virus de la grippe, qui se modifie fréquemment).
Les vaccinations courantes
Les vaccinations concernent des maladies graves ou fréquentes et évitables.
Chez l'enfant
Jusqu’en 2017, certaines vaccinations étaient obligatoires, d'autres facultatives mais fortement conseillées : contre la tuberculose (B.C.G.), contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite (D.T.P.), mais aussi contre la coqueluche – maladie infectieuse particulièrement grave chez le jeune nourrisson –, contre la rougeole, les oreillons et contre la rubéole (vaccin R.O.R.), le pneumocoque responsable de méningite et de pneumonie, les hépatites à virus B, le papillomavirus du cancer du col utérin conseillé chez la jeune fille, la fièvre jaune pour les personnes résidant en Guyane.
Depuis le 1er janvier 2018, suite à la stagnation de la couverture vaccinale, insuffisante pour assurer l’immunité de groupe contre certaines maladies, et la réapparition de foyers épidémiques (rougeole, méningite C), l’obligation vaccinale (jusque-là limitée au DTP) a été étendue aux vaccinations contre la coqueluche, la rougeole, les oreillons, la rubéole, l’Hæmophilus influenzæ de type B, l’hépatite B, le pneumocoque, et le méningocoque C.
Chez l'adulte
On distingue des vaccinations de plusieurs types : celles concernant des affections présentes dans toutes les parties du monde (tétanos, diphtérie, poliomyélite, poliomyélite, rubéole pour les femmes non immunisées, grippe pour les les femmes enceintes et les personnes âgées ou fragiles) ; celles qui sont obligatoires pour les personnes se rendant dans certains pays tropicaux ; celles, enfin, rendues nécessaires par une affection particulière ou en raison des risques inhérents à certaines professions (hépatite B pour les personnels de santé, rage pour les travailleurs agricoles, les vétérinaires ou les gardes forestiers, hépatite A pour les employés des secteurs alimentaires, etc.).
Enfin, en vue d'un voyage dans un pays où sévissent encore des maladies à potentiel épidémique (fièvre jaune, encéphalite japonaise, encéphalite à tiques, méningite à méningocoque par exemple), les vaccinations correspondantes doivent être pratiquées. Le vaccin contre la fièvre jaune est, selon les recommandations de l'Organisation mondiale de la santé (O.M.S.), obligatoire pour tout voyage en zone contaminée. Les pèlerins qui se rendent à La Mecque doivent être vaccinés contre une souche particulière de méningocoque en raison d’un risque spécifique.
Pour en savoir plus,
Le calendrier des vaccinations
Le calendrier des vaccinations établi dans chaque pays inclut les vaccins strictement obligatoires, pour la scolarisation par exemple, et les vaccins recommandés.
Calendrier des vaccinations
Contre-indications et effets indésirables
• Les contre-indications absolues à l'administration d'un vaccin sont l’hypersensibilité aux excipients ou à certaines valences et, pour les vaccins à virus vivant atténué, certains déficits immunitaires. Les vaccins bactériens inactivés (pratiquement tous remplacés désormais par des vaccins acellulaires) sont contre-indiqués en cas de grossesse ou de de forte réaction après une précédente injection.
En présence d'un terrain fortement allergique (à l’œuf notamment), la vaccination est possible selon un protocole bien défini comportant notamment une épreuve de tolérance au vaccin. La plupart des vaccins actuels sont inoffensifs en cas d’allergie à l’œuf, sauf peut-être les vaccins contre la fièvre jaune et l’encéphalite à tiques.
• Les contre-indications temporaires à l'administration d'un vaccin sont une fièvre certaines maladies neurologiques évolutives non stabilisées, et la prise de certains traitements immunosuppresseurs (corticothérapie, chimiothérapie anticancéreuse…) ; dans ce dernier cas, la vaccination sera, si possible, reportée après la fin du traitement.
Pendant la grossesse sont contre-indiqués par précaution les vaccins à germes entiers et à virus vivant atténué, sauf le vaccin antirabique (contre la rage) en cas de contamination certaine ainsi que le vaccin antiamarile (contre la fièvre jaune) en cas d'urgence. Les autres vaccins ne sont pas pratiqués, par précaution, sauf en cas d'urgence (mais ils le sont dans d’autres pays). En revanche, il est possible et même conseillé de vacciner une femme enceinte contre la grippe.
• Les effets indésirables. L'administration de certains vaccins peut entraîner des réactions locales (douleurs, rougeurs, gonflements), et plus rarement, une fièvre et parfois des réactions allergiques (fièvre, urticaire). Quelques cas d’encéphalites ont été décrits après un vaccin anti-rougeole/rubéole/oreillons, de façon bien plus rare (1 sur 10 millions de doses) qu’après la maladie (1 sur 1 000 à 6 000 cas). Le vaccin anti-rotavirus peut être à l’origine d’une invagination intestinale aiguë, de façon rare.
Un débat existe sur la responsabilité des vaccins et notamment de leurs excipients dans certaines maladies auto-immunes comme la sclérose en plaques ou l’hépatite auto-immune, mais aucune preuve n’a été rapportée à ce jour. Il a été prouvé que la vaccination des nourrissons et jeunes enfants n’augmentait pas le risque de mort inattendue du nourrisson, ni d’autisme. L’aluminium vaccinal peut parfois persister au site d’injection, mais il n’est pas responsable d’une atteinte musculaire diffuse ni d’une maladie générale.
Exposition prénatale aux perturbateurs endocriniens et troubles du comportement des enfants
Exposition prénatale aux perturbateurs endocriniens et troubles du comportement des enfants
COMMUNIQUÉ | 29 SEPT. 2017 - 10H22 | PAR INSERM (SALLE DE PRESSE)
SANTÉ PUBLIQUE
Une étude épidémiologique menée par l’Inserm[1] sur les familles de la cohorte EDEN (500 garçons nés entre 2003 et 2006 et leurs mères) montre que l’exposition pendant la grossesse à certains phénols et phtalates est associée à des troubles du comportement des garçons entre 3 et 5 ans. Les composés les plus préoccupants à cet égard sont le bisphénol A, le triclosan et le di-n-butyl phtalate, ou DBP. Les résultats viennent d’être publiés dans la revue Environmental Health Perspectives.
Le bisphénol A a été interdit de tous les contenants alimentaires en France en janvier 2015, une date ultérieure à la réalisation de cette étude. Le triclosan est un agent antibactérien retrouvé dans certains dentifrices et savons ; le DBP est utilisé comme plastifiant dans les plastiques de type PVC, certaines colles, vernis à ongles et laques pour les cheveux. Triclosan et DBP sont réglementés selon la logique d’une valeur limite dans certaines familles de produits, tout en étant interdits dans d’autres (le DBP est par exemple interdit d’usage dans les cosmétiques et le triclosan dans les habits dans l’UE). Des études toxicologiques in vitro et chez l’animal ont mis en évidence que ces composés étaient des perturbateurs endocriniens et pouvaient interagir avec des systèmes hormonaux impliqués dans le développement normal du système nerveux central. Les mécanismes précis qui pourraient expliquer un effet des perturbateurs endocriniens sur le neurodéveloppement et le comportement pourraient passer par une altération du fonctionnement des hormones thyroïdiennes, des hormones stéroïdiennes, comme l’œstrogène, ou d’autres hormones, comme l’ocytocine ou la vasopressine, des hormones sécrétées par l’hypothalamus.
Face à ces premières conclusions chez l’animal, les chercheurs ont souhaité étudier l’association entre les expositions aux perturbateurs endocriniens pendant la grossesse et le comportement ultérieur des enfants.
L’étude a porté sur 529 petits garçons de la cohorte mère-enfant EDEN, mise en place par l’Inserm. Les femmes enceintes participant à cette cohorte ont été recrutées entre 2003 et 2006 dans les CHU de Nancy et Poitiers. Aux troisième et cinquième anniversaires de l’enfant, ces mamans ont rempli un questionnaire standardisé évaluant certains aspects du comportement de leur enfant tel que l’hyperactivité, les troubles émotionnels et les troubles relationnels. Ce questionnaire standardisé, utilisé depuis une vingtaine d’années, intitulé « Questionnaire des forces et difficultés » de l’enfant, permet d’établir un score dans différentes dimensions du comportement tels que les symptômes émotionnels, les problèmes de relation avec les pairs, les problèmes de conduite, d’hyperactivité et d’inattention. Un échantillon d’urine prélevé durant la grossesse a permis le dosage de biomarqueurs caractéristique de l’exposition aux phénols et aux phtalates dans le Laboratoire de Santé Environnementale des CDC d’Atlanta, qui est en charge des campagnes de biosurveillance américaines.
De 70 à 100% des femmes de la cohorte Eden, recrutées durant leur grossesse entre 2003 et 2006, étaient alors exposées à des niveaux détectables de différentes substances. Les niveaux urinaires étaient de l’ordre de 1 à 3 µg par litre pour le bisphénol A, de 10 à 100 µg par litre pour le triclosan, et de 50 à 200 pour le méthylparabène. Les résultats suggèrent que l’exposition maternelle à certains phénols et phtalates est associée à des troubles du comportement des petits garçons.
L’exposition au bisphénol A était associé à une augmentation des troubles relationnels à 3 ans et des comportements de type hyperactif à 5 ans. Les chercheurs notent que ce travail confirme ainsi que les effets du bisphénol A sur le comportement observés chez l’animal de laboratoire se retrouvent chez l’humain à des expositions faibles, probablement inférieures à celles préconisées par l’autorité européenne de sécurité alimentaire, l’EFSA.
Le métabolite du DBP était lui associé à davantage de troubles émotionnels et relationnels, incluant les comportements de repli, à 3 ans, mais pas à 5 pour les troubles émotionnels. Des associations entre ces composés et le comportement avaient déjà été mis en évidence dans des études précédentes chez de jeunes garçons et chez l’animal. Ainsi, dans une étude réalisée à partir de femmes et d’enfants new-yorkais, une augmentation des comportements de repli chez les enfants de 3 ans avec des niveaux croissants du métabolite du DBP avaient été rapportés en 2012.
Les résultats de cette étude ont aussi montré une association entre le triclosan et une augmentation des troubles émotionnels à 3 et 5 ans. Il s’agit de la première étude évaluant les effets de ce composé sur le comportement, pour lequel l’équipe d’épidémiologie environnementale de Grenoble avait déjà mis en évidence une diminution du périmètre crânien à la naissance, dans cette même population. Au niveau moléculaire, le triclosan est capable d’interagir avec l’axe thyroïdien qui, pendant la grossesse, est impliqué dans le développement du cerveau du fœtus.
L’effectif de l’étude, qui est une des plus vaste sur la question, ne permettait pas d’étudier directement la survenue de pathologies du comportement comme les troubles du spectre autistique, ce qui impliquerait de suivre des dizaines de milliers d’enfants.
Les équipes de recherche vont désormais s’attacher à répliquer ces résultats au sein de la cohorte mère-enfant SEPAGES en cours dans la région Grenobloise, coordonnée par l’Inserm et soutenue par l’European Research Council. Dans cette dernière, de nombreux échantillons d’urine par participant sont recueillis durant la grossesse et les premières années de vie de l’enfant. Cette approche permettra de limiter les erreurs de mesure de l’exposition et d’identifier de potentielles périodes de sensibilité aux phénols et phtalates sur différents événements de santé tels que la croissance, le comportement ou la santé respiratoire. Cela permettra aussi d’étudier l’effet éventuel de ces substances chez les petites filles, qui n’avaient pu être considérées ici. Il est possible que leur sensibilité aux perturbateurs endocriniens diffère de celle des garçons.
[1] Un consortium de recherche associant des équipes de recherche Inserm, les CHU de Nancy et Poitiers, le Center for Disease Controls and Prevention (CDC, Atlanta, USA), et coordonné par l’équipe d’épidémiologie environnementale de l’Institut pour l’Avancée des Biosciences (Inserm/CNRS/Université Grenoble Alpes).